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Mediapart
Affaire Firmin Le Bodo : le deal entre Urgo et des pharmaciens est un manque à gagner pour l’État
#santé #pharmacie #conflitsdinterets
Article mis en ligne le 22 mars 2024
dernière modification le 20 mars 2024

Les cadeaux de la multinationale Urgo aux pharmaciens, pour lesquels la ministre de la santé est visée par une enquête, ont fait perdre aux finances publiques jusqu’à 14 millions d’euros de recettes fiscales, selon les calculs de Mediapart.

Pour le laboratoire et les pharmacien·nes, l’accord promettait d’être gagnant-gagnant. Pour l’État et les finances publiques, c’est une tout autre affaire. Mediapart a révélé que la ministre de la santé Agnès Firmin Le Bodo, nommée le 20 décembre dernier, était visée par une enquête judiciaire concernant son activité de pharmacienne au Havre (Seine-Maritime).

Selon nos informations, elle aurait reçu pour 20 000 euros de cadeaux comme des montres de luxe et du champagne de la part du laboratoire Urgo de 2015 à 2020. Une pratique illégale que la multinationale française a reconnu avoir mise en place partout en France pour fidéliser les pharmacien·nes et augmenter ses marges commerciales. Les récompenses en échange de commandes concernaient principalement des produits de la « gamme blanche », des compresses, bandes et sparadraps.

Une des plus hautes représentantes de l’État est donc soupçonnée d’avoir bénéficié de biens à titre personnel via un système qui a amputé la puissance publique de sommes assujetties à l’impôt passées sous les radars. (...)

Selon les informations de Mediapart, 8 000 pharmacien·nes de France, soit près d’un tiers de la profession, auraient succombé au système mis en œuvre par Urgo, avec un catalogue affichant des iPhone, bijoux, perceuses, canapés, tables de billard, bouteilles de champagne et même des voitures, dont Mediapart a dévoilé quelques pages. Toutes et tous auraient par là même enfreint la loi anti-cadeaux de 1993, destinée à éviter les conflits d’intérêts dans le champ de la santé et bien connue dans les officines. La plupart des concurrents d’Urgo ont cessé cette politique à l’ancienne, même s’ils ont appris à la contourner, notamment à coup de campagnes de communication masquées. (...)

Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), n’a pas non plus cédé aux sirènes d’Urgo. « En tant que représentant de la profession, nous avons un devoir d’exemplarité, qui est supérieur encore pour la ministre. Elle devrait démissionner », dénonce-t-il.

En attendant, Agnès Firmin Le Bodo a simplement été déportée le 22 décembre « des actes de toute nature relatifs spécifiquement à l’organisation ou au statut de la profession de pharmacien titulaire d’officine ». Et ce, en conformité avec un décret qui vise à éviter qu’un·e ministre se trouve « en situation de conflit d’intérêts ».