
Trente-deux migrants, en route vers l’Europe, sont bloqués depuis samedi en pleine mer sur une plateforme gazière, au large de la Tunisie. Les exilés, affaiblis, dorment à même le sol dans un espace exigu à la merci des intempéries. Ni Malte ni l’Italie n’ont répondu aux demandes de sauvetage, alors que la Tunisie a indiqué que le temps était trop mauvais pour atteindre la plateforme gazière.
Abandonnés à leur sort par les autorités compétentes, ces exilés réclament désespérément de l’aide, et un sauvetage rapide.
"Nous sommes malades et affamés (...) Nous mourrons de froid (...) Venez nous aider !", supplie un homme qui s’exprime en tigrigna, la langue d’Érythrée, dans une vidéo partagée par le compte X de l’ONG italienne Mediterranea saving humans. Sur ces images, on voit des personnes allongées au sol, les corps sont amaigris et les visages épuisés. L’un des exilés semble trembler, probablement transi de froid. Dans un espace exigu situé en bas de la plateforme, ces migrants survivent dans des conditions très difficiles, à la merci des intempéries.
Ces personnes ont alerté dès samedi Alarm Phone, la hotline d’aide aux migrants en détresse en mer, pour les prévenir que leur bateau, parti de Zouara en Libye, était à la dérive et que le moteur fonctionnait mal. Quelques heures plus tard, ils se sont réfugiés sur cette plateforme gazière.
L’ONG Sea-Watch, avec son avion Seabird, a survolé la zone à deux reprises, samedi et lundi, confirmant leur présence, photos à l’appui. "La plateforme ne peut pas fournir de soins adéquats aux personnes en détresse", insistent les humanitaires.
"La Tunisie n’est pas un port sûr"
Mais, pourquoi aucune opération n’a été lancée depuis trois jours ? Qui est responsable de ce sauvetage ? Miskar, sous juridiction tunisienne, se situe dans les eaux internationales, dans la zone de sauvetage (SAR zone) partagée entre la Tunisie et Malte. La Valette, capitale de Malte, n’a pas répondu aux demandes de sauvetage envoyées par les ONG.
De leur côté, les gardes-côtes tunisiens assurent qu’ils vont venir porter secours aux exilés, mais que "la mer agitée empêche toute intervention", indique à InfoMigrants Sophia, membre d’Alarm Phone. Pourtant, "hier [lundi 3 mars, ndlr] on avait l’impression que c’était navigable. Serait-ce de la mauvaise volonté de la part de Tunis ?", s’interroge-t-elle. (...)
En outre, les humanitaires exhortent les autorités européennes à intervenir dans cette affaire. "La Tunisie n’est pas un port sûr", rappelle Mediterranea saving humans. "[Ces personnes] risquent d’être expulsées illégalement, ce qui les condamneraient à de nouvelles persécutions et souffrances en Tunisie", renchérit Sea-Watch.
Depuis l’été 2023, les Subsahariens vivant en Tunisie sont la cible de violences : ces deux dernières années, des milliers de migrants ont été raflés dans les rues par des membres de la Garde civile et envoyés dans le désert à la frontière avec l’Algérie et la Libye. Les migrants sont abandonnés au milieu de nulle part et doivent rebrousser chemin par leurs propres moyens. Une centaine de personnes y sont mortes de faim ou de soif. Certains exilés seraient même échangés aux milices libyennes contre de l’argent, selon plusieurs témoignages. Des pratiques qui perdurent encore aujourd’hui.
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Ce n’est pas la première fois que des exilés se retrouvent bloqués sur la plateforme gazière Miskar. (...)