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"Je n’en peux plus, je veux quitter la Tunisie" : témoignages de migrants, démunis face à la lenteur des "retours volontaires"
#Tunisie #exiles #migrants #immigration #OIM #retoursVolontaires
Article mis en ligne le 21 juillet 2025
dernière modification le 19 juillet 2025

Alors que la pression sur les migrants en Tunisie s’accentue, des milliers d’entre eux cherchent à quitter le pays, via le programme de "retours volontaires" de l’Organisation internationale des migrations (OIM). Mais l’agence, débordée par les dossiers, peine à prendre en charge toutes les demandes. Témoignages de trois exilés, tous Ivoiriens, qui n’attendent qu’une chose : rentrer dans leur pays.

(...) Après les évacuations massives des camps installés dans les champs d’oliviers de la région de Sfax en avril, les demandes de "retour volontaire" de l’OIM ont explosé. Pendant des jours, d’importantes files d’attente se sont formées devant les locaux de l’agence onusienne.
L’OIM organise les retours au pays en fournissant un billet d’avion aux migrants et en leur apportant, sous conditions, une aide financière pour faciliter leur réinsertion.
(...)

Contactée par InfoMigrants, l’agence onusienne explique qu’en "fonction des besoins et des vulnérabilités [des migrants], et selon les ressources disponibles, une assistance sociale, médicale, psychosociale et/ou juridique peut être mise en place". "Ce soutien peut inclure l’hébergement temporaire, la distribution de biens non alimentaires ou encore un accompagnement administratif", ajoute l’agence.
Mais face à l’explosion des demandes de "retours volontaires" ces derniers mois en Tunisie, l’OIM, débordée, peine à prendre en charge toutes les demandes. Résultat : des centaines de migrants, comme Edwige, se retrouvent livrés à eux-mêmes en attendant le traitement de leur dossier.
(...)

Depuis l’été 2023, le gouvernement tunisien multiplie les restrictions à l’encontre des migrants sans-papiers. Il leur est interdit de travailler. Les Tunisiens ont interdiction de leur fournir un logement. Le but des autorités : empêcher les exilés de financer leur traversée de la Méditerranée. Dans la réalité, ces mesures ont fait sombrer les Subsahariens, désormais sans ressources, dans une extrême précarité. (...)

Seydou, Ivoirien, 24 ans

"Début avril, j’ai demandé un ‘retour volontaire’ à l’OIM. Mais depuis, rien n’a changé. Quand je les appelle, ils me répondent toujours qu’il faut patienter et qu’ils vont me recontacter. Mais je n’en peux plus d’attendre, je veux quitter ce pays !

Je suis découragé. Je suis sur la route depuis cinq ans, j’ai passé trois ans en Libye et deux en Tunisie. Mes conditions de vie sont devenues trop compliquées. Mon quotidien, c’est la précarité.

Je suis installé au km 34 [dans la région de Sfax, les camps portent les noms des kilomètres indiqués le long de la route principale, ndlr] mais en juin la Garde nationale est venue tout brûler.

Depuis deux ans, les migrants, chassés des centres-villes par les autorités, ont érigé d’immenses campements dans les champs d’oliviers d’El-Amra, près de Sfax, dans le centre-est de la Tunisie. Début avril, la Garde nationale a mené une vaste opération d’évacuations dans les camps, laissant des milliers de migrants dans le plus grand dénuement. Encore aujourd’hui, les camps de la région sont régulièrement démantelés par les forces de l’ordre.

Je me suis débrouillé et j’ai pu reconstruire une habitation de fortune au km 25. C’est tout ce que j’ai. On se soutient entre nous, on cotise pour acheter de la nourriture mais certains jours, je n’ai rien à manger. On n’a même pas d’eau. On en récupère un peu au système d’arrosage des propriétaires des champs. On n’a pas le choix.

Ces derniers jours, je suis malade. Ça ne va pas. Je maigris de jour en jour. Je ne peux pas aller à l’hôpital. J’ai trop peur d’être arrêté par la police et envoyé dans le désert, ou même d’être agressé. On est souvent frappés par des Tunisiens qui nous volent nos téléphones.

Depuis deux ans, les autorités mènent de vastes campagnes d’arrestations et interpellent les Noirs vivant en Tunisie, notamment dans la région de Sfax. Des milliers de Subsahariens ont été envoyés dans le désert, à la frontière avec la Libye ou l’Algérie. Abandonnés au milieu de nulle part, les migrants mettent des jours à revenir dans le centre-est de la Tunisie.

Je veux rentrer chez moi. Si j’avais de l’argent, je paierai pour ‘me retourner’. (...)