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Chronique de Palestine
Crimes de guerre à Gaza : comment consigner les viols et autres violences sexuelles ?
#israel #palestine #Gaza #Cisjordanie #viols
Article mis en ligne le 23 décembre 2025
dernière modification le 21 décembre 2025

Les femmes palestiniennes de Gaza ont été victimes de violences sexuelles généralisées pendant le génocide israélien. Malgré les nombreuses preuves, les organisations de défense des droits humains ont du mal à obtenir justice, car les femmes vivent dans la crainte de la stigmatisation sociale et des représailles d’Israël.

L’histoire de N.A., une Palestinienne détenue et qui aurait été violée par quatre soldats israéliens, a provoqué une onde de choc dans une communauté déjà ravagée par la guerre.

Détaillée dans le rapport choquant publié le mois dernier par le Centre palestinien pour les droits de l’homme (PCHR), l’histoire de N.A. n’est qu’un exemple parmi tant d’autres, révélant les viols et les tortures sexuelles systématiques infligés aux détenus palestiniens par les autorités israéliennes.

Son refus de se faire soigner après sa libération, se repliant dans un cercle de silence, met en évidence une réalité omniprésente et dévastatrice dans la bande de Gaza.

Malgré les tentatives répétées des organisations de défense des droits humains pour documenter son cas et lui apporter leur soutien, N.A. a refusé tout nouvel entretien, révélant ainsi la peur qui paralyse d’innombrables survivantes.

« Les personnes qui nous parlent ne se sentent fondamentalement pas en sécurité pour révéler leur expérience », explique Yasser Abdel Ghafour, directeur adjoint de l’unité de documentation d’un centre local de défense des droits humains. « Elles préfèrent ne pas élargir le cercle des personnes qui connaissent leur situation, ce qui exposerait davantage leur identité. »

Selon Abdel Ghafour, il ne s’agit pas d’un incident isolé. « Nous avons connaissance de nombreux cas similaires », explique-t-il. « Nous avons contactés ces personnes à plusieurs reprises pour qu’elles partagent leur histoire, mais elles ont catégoriquement refusé, estimant que cela mettrait leur vie encore plus en danger. C’est particulièrement vrai pour les femmes. »
La violence sexuelle comme arme de guerre

Les organisations locales et internationales de défense des droits humains indiquent que le recours à la violence sexuelle par les forces d’occupation n’est pas une série d’incidents isolés, mais fait partie d’un comportement récurrent dans les centres de détention.

Bien qu’aucun organisme international n’ait encore mené d’enquête approfondie, les témoignages, en particulier ceux des femmes détenues, font état de pratiques systématiques d’humiliation sexuelle, de dégradation et de destruction de l’identité.(...)

Ce climat de peur s’étend au-delà de la violence sexuelle et à toutes les formes de documentation. Munir al-Bursh, directeur au sein du ministère de la Santé de Gaza, confirme cette tendance à Mondoweiss.

Il dit avoir rencontré des cas où des personnes ont insisté à plusieurs reprises pour que leur identité et leurs informations médicales restent confidentielles, invoquant des menaces directes de représailles de la part de l’occupant israélien si leurs tragédies étaient rendues publiques.

La menace ne se limite pas aux survivants. Les défenseurs des droits humains, les observateurs et les organisations locales de la société civile, telles que le PCHR, le Centre Al-Mezan pour les droits humains et le Centre pour les affaires féminines, sont également systématiquement pris pour cible en raison de leur travail de dénonciation des crimes israéliens.

Ces organisations, qui ont déjà du mal à fonctionner, sont constamment victimes d’intimidations de la part d’Israël.

Cela inclut des attaques physiques directes, telles que la destruction totale du bureau de Humanity & Inclusion (HI) à Gaza en janvier 2024, alors même que ses coordonnées étaient enregistrées dans le système de notification de l’ONU.

Human Rights Watch (HRW) a également documenté au moins huit frappes israéliennes contre des convois et des locaux d’humanitaires, alors même que leur emplacement avait été communiqué aux autorités israéliennes d’occupation.

Lignes d’assistance téléphonique anonymes

Si le nombre de cas dûment répertoriés de viols et d’exploitation et d’abus sexuels (EAS) reste faible, ces incidents sont largement sous-déclarés. (...)

Un vide en matière d’obligation de rendre des comptes

Les enquêtes internationales sur les violences sexuelles à Gaza ne peuvent aboutir sans témoins. Or, ceux qui pourraient témoigner vivent dans la peur constante, sous la menace permanente, déplacés et profondément traumatisés psychologiquement.

L’insécurité permanente, aggravée par la destruction des habitations et des services essentiels, rend presque impossible pour les survivants de se manifester en toute sécurité.

Il en résulte un écart considérable entre l’ampleur des violations et la capacité des organisations de défense des droits humains à les documenter et à demander justice.

« Nous avons recueilli de nombreux témoignages au fil des ans, mais nous manquons de témoins prêts à se manifester », explique Abdel Ghafour, directeur adjoint de l’unité de documentation du PCHR.

« Le silence imposé par la peur et la stigmatisation sociale fait que les dossiers sur les viols et les tortures sexuelles restent parmi les plus difficiles et les plus déchirants à traiter. Sans témoins, la responsabilité reste presque totalement hors de portée, et les survivants continuent à porter seuls le poids de ces crimes. »