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Observatoire des Inégalités
Comment la grande pauvreté a changé de visage
#pauvrete #inegalites
Article mis en ligne le 27 décembre 2025
dernière modification le 25 décembre 2025

Plus souvent sans aucunes ressources, féminisées et d’origine étrangère : en 30 ans, le portrait des personnes les plus pauvres a changé. Une étude menée par le Secours catholique auprès de personnes rencontrées par l’association.

Le Secours catholique publie depuis 30 ans un rapport sur les personnes rencontrées par ses 58 000 bénévoles dans ses lieux d’accueil. Le portrait de ces personnes permet de décrire une évolution des populations les plus démunies de notre pays. Il ne s’agit pas d’une statistique sur l’ensemble des personnes pauvres à l’échelle nationale, mais sur une partie, la plus défavorisée, de celles-ci : celles qui n’ont parfois plus rien du tout, et n’ont pour ultime solution que le recours aux associations d’aide, et qui osent en franchir le seuil. Depuis le milieu des années 1990, la population soutenue par le Secours catholique a changé. Plus souvent sans aucunes ressources, féminisée et d’origine étrangère. De nombreux jeunes en situation précaire, mais aussi un retour de personnes âgées.

La récente intensification de la pauvreté (...)

En 2024, le niveau de vie médian [1] des personnes accueillies est de 565 euros par mois. En prenant en compte l’inflation, c’est un peu mieux qu’en 1994 (environ 507 euros), autant qu’en 2000, mais en forte baisse depuis dix ans (658 euros en 2014). Principale explication : l’accueil croissant de personnes sans ressources. Si l’on s’en tient aux ménages ayant des ressources, leur niveau de vie augmente (de 624 euros en 2000 à 765 euros en 2024) à peu près au même rythme que celui de la population générale.

Parmi les personnes rencontrées, les taux de pauvreté et d’extrême pauvreté, relativement stables jusqu’en 2008, ont fléchi jusqu’en 2017 avant de remonter. En 2024, 94,7 % des personnes rencontrées vivent sous le seuil de pauvreté de 60 % du niveau de vie médian. La proportion a augmenté de trois points depuis 2017, à un niveau équivalent à celui des années 1990. Le taux d’extrême pauvreté a augmenté de onze points entre 2017 et 2023 : aujourd’hui, 74 % des ménages rencontrés vivent sous le seuil d’extrême pauvreté [2] (c’est le cas de 3,7 % de la population générale). L’évolution est similaire si l’on en retire les ménages sans ressources.

En 2024, 25,7 % des ménages accueillis vivent sans aucunes ressources, si ce n’est de la débrouille et la solidarité des proches et des associations (...)

la part des « sans ressources » a fortement augmenté parmi les ménages français également, depuis trois ans (8,2 % en 2024, contre 3,6 % en 2021), révélateur de situations d’exclusion et de grandes difficultés d’accès aux droits (dématérialisation des démarches, ruptures de droits...) : une hausse qui coïncide avec les réformes de l’assurance chômage et du RSA. Ce sont pour moitié des hommes seuls, et la part des mères isolées augmente (de 7 % en 1999 à 15 % en 2024). Ils vivent souvent en situation d’errance, sans solution de logement stable (pour 70 % d’entre eux). (...)

Les femmes et les enfants d’abord

Le visage de la pauvreté que rencontre le plus le Secours catholique, ce sont les femmes et les enfants. Les femmes représentent 56,5 % des adultes rencontrés en 2024, une hausse de cinq points en trente ans. Les familles avec enfants sont toujours surreprésentées, particulièrement les mamans solos. (...)

C’est notamment le cas pour celles de nationalité étrangère (près de la moitié d’entre elles) : 49 % ne perçoivent aucunes ressources et 61 % vivent dans un logement précaire (en hausse de cinq points en deux ans).

Les premières victimes de la pauvreté des parents restent les enfants, qui représentent 39 % des personnes soutenues par l’association (...)

La part croissante des ménages étrangers

En 2024, 52,7 % des adultes accueillis par le Secours catholique sont de nationalité étrangère, contre 20 % en 1994. Une progression sans commune mesure avec la légère hausse de la part d’étrangers en France sur la même période (...)

Le nouveau visage des travailleurs pauvres

L’emploi est souvent présenté comme un antidote à la pauvreté. Non sans raisons : dès lors que les adultes ayant droit au travail occupent un emploi, le Secours catholique les rencontre nettement moins. Le taux d’emploi des adultes accueillis est 3,8 fois inférieur à celui de la population générale (un ratio stable entre 1999 et 2024, malgré la légère progression du taux d’emploi dans le pays).

Mais occuper un emploi ne suffit pas à protéger de la pauvreté. 17,9 % des personnes rencontrées par le Secours catholique occupent un emploi. Leur niveau de vie est très faible, 855 euros par mois en 2024 (contre 2 443 euros par personne pour l’ensemble de la pour la population). (...)

Moins de chômeurs, plus de personnes éloignées de l’emploi

De façon constante, le taux de chômage des personnes rencontrées par le Secours catholique est supérieur à ce qu’il est en population générale : 23,4 % contre 7,4 % en 2024. Depuis dix ans, il a fortement baissé, davantage encore que dans le reste de la population, après avoir atteint 44 % entre 2005 et 2015. Particularité : il touche davantage les hommes (30,5 %) que les femmes (22 %). La part des plus de 50 ans a plus que doublé en vingt-cinq ans (32,4 % en 2024 contre 14,7 % en 1999).

Le Secours catholique rencontre ainsi moins de personnes au chômage, mais davantage de personnes durablement éloignées de l’emploi (...)

Le retour progressif de la pauvreté chez les seniors (...)

La pauvreté rurale gagne du terrain (...)