
Dandeli, une ville sur les rives de la Kali, une rivière du nord de l’État indien du Karnataka. Le 27 juillet dernier, un homme marche tranquillement vers sa voiture lorsqu’un homme masqué surgit un sabre à la main, se jette sur lui et le frappe de son arme. Des passants se portent à son secours et l’emmènent à l’hôpital ; il y arrive mort. Ajit Maneshwar Naik, 57 ans, venait de gagner un combat pour éviter qu’un septième barrage ne fasse définitivement disparaître la rivière Kali et les écosystèmes qui l’entourent. Il continuait d’affronter les mafias locales en luttant contre les déversements d’effluents polluants par des papeteries de la région, où les taux de pollution de l’eau sont élevés. L’Inde est l’un des pays où on tue le plus de militants de l’environnement.
L’ONG Global Witness écrit dans son rapport 2018 que quatre défenseurs de l’environnement sont assassinés chaque semaine, et probablement davantage puisque les informations sont incomplètes. D’innombrables militants reçoivent des menaces diverses et souvent de mort, envers eux et leurs proches, subissent un harcèlement juridique, des arrestations, des assignations à résidence et des détentions arbitraires, ou sont soumis à une surveillance illégale, à des chantages ou sont enlevés sans qu’on sache où ils sont. Le nombre de morts augmente chaque année et la forme de la violence aussi. Le rapport montre aussi que ceux qui, partout dans le monde, sont responsables ou complices des attaques contre les défenseurs de l’environnement, restent impunis.
En Europe aussi la violence monte (...)
Fatima Babu, une ancienne professeure d’anglais qui anime depuis 23 ans la lutte contre l’entreprise polluante, pleure les morts : « Quelque chose ne va pas dans le monde, les militants sont traités comme des terroristes, alors que nous sommes au contraire de vrais patriotes, qui refusons que notre pays soit vendu à des industriels qui en tirent profit ! » Elle espère que la fermeture sera définitive et que l’entreprise réhabilitera correctement l’environnement pollué.(...)
En Europe aussi la violence monte. Les policiers se déguisent en soldats et forment de véritables bataillons contre des activistes presque toujours désarmés.
Steffen M., un jeune militant de 27 ans est mort le 19 septembre, alors qu’il cherchait à documenter l’arrestation d’un militant. Il écrivait et filmait la résistance du collectif Hambi Bleibt, dont les 150 militants perchés dans 51 cabanes dans les arbres, s’opposent depuis six ans à la destruction de la forêt millénaire de Hambach, passée de 4.100 hectares à 200, dans l’ouest de l’Allemagne. 3.500 policiers armés de canons à eau, accompagnés de chevaux et d’hélicoptères étaient sur place pour permettre l’abattage mené par la compagnie électrique RWE pour étendre une mine de charbon géante à ciel ouvert.
(...)
Leaders autochtones ou paysans, manifestants pacifiques, avocats, journalistes ou membres d’ONG travaillant pour dénoncer les atteintes à l’environnement, l’accaparement des terres et d’autres violations… ce sont souvent des gens ordinaires, en première ligne dans la défense de l’avenir de notre planète. Ils sont confrontés à des menaces de plus en plus violentes, parce que, non seulement les gouvernements et les entreprises ne remplissent pas leur devoir, mais tendent à les considérer comme des criminels !(...)
Nicolas Hulot a clairement dénoncé la raison de cette situation dangereuse : « Les lobbies n’ont rien à faire dans les cercles du pouvoir. Il faut à un moment ou un autre poser ce sujet sur la table parce que c’est un problème de démocratie. Qui a le pouvoir ? Qui gouverne ? »