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Basta !
L’avenir de notre alimentation se joue en ce moment à Bruxelles
Article mis en ligne le 17 septembre 2012

Pour la première fois, les députés européens seront invités à voter la réforme de la Politique agricole commune (PAC) : un budget de 56 milliards d’euros destiné à soutenir l’agriculture européenne. Mais quelle agriculture ? Celle qui crée ou détruit des emplois ? Celle qui évite les pollutions ou les encourage ? Celle qui freine la spéculation ou l’aggrave ? Celle qui rémunère correctement les producteurs ou qui favorise les gaspillages ?

Les citoyens ont cette fois aussi leur mot à dire, alors qu’une « Good Food March » arrive à Bruxelles. (...)

Le Parlement européen s’apprête, pour la première fois, à voter la réforme de la Politique agricole commune (PAC). Un privilège réservé jusque-là au Conseil des ministres de l’agriculture (qui rassemble les ministères de 27 États membres) [1]. Les négociations entre Commission de Bruxelles, Parlement de Strasbourg et les ministères de l’agriculture ont commencé et se concluront en janvier 2013 par une nouvelle politique agricole.

Celle-ci aura des impacts sur l’emploi, sur l’environnement, sur les zones rurales et sur notre alimentation à tous. (...)

En organisant une « Good Food March » (Marche pour une bonne alimentation), 80 organisations paysannes et environnementales, de 15 pays européens, comptent bien peser sur le contenu de la réforme. Des caravanes parties de Munich, de Rotterdam, du Pays basque et de Calais, convergent sur Bruxelles. Elles y arriveront le 19 septembre pour faire valoir leurs doléances et les soumettre au Parlement européen. Une urgence alors que « les premiers échos des négociations ne sont pas bons », s’inquiète Aurélie Trouvé de l’association altermondialiste Attac France. (...)

Si les ressources de la planète peuvent nourrir 12 milliards d’humains, la spéculation et la mainmise des multinationales sur les matières premières créent une pénurie, rappelle par ailleurs Jean Ziegler dans un entretien à Basta !. La réforme de la PAC, telle qu’elle se dessine, risque de les aggraver. (...)

Les organisations à l’initiative de la Good Food March réclament un plafonnement et une modulation des aides. Pour elles, il s’agit de freiner l’agrandissement et l’industrialisation des exploitations, et permettre une meilleure répartition des crédits agricoles en faveur des petites et moyennes structures. (...)

Il se murmure dans les couloirs de Bruxelles que la PAC n’a pas vocation à être une politique sociale. Faut-il dès lors s’étonner que l’agriculture française ait perdu en 50 ans l’essentiel de ses forces vives avec 6,2 millions de personnes en 1955 contre 1,1 million aujourd’hui ? (...)

« On est en train de supprimer toutes les régulations des marchés intérieurs, dénonce Aurélie Trouvé. L’alignement des prix européens sur les prix mondiaux pour être plus compétitifs sur les marchés conduit à une extrême volatilité des prix qui ne couvrent même plus les coûts de production. « Cette mise en concurrence conduit à la concentration des fermes, à la spécialisation régionale, à la destruction de l’emploi et des ressources naturelles », analyse la co-présidente d’Attac. (...)

« Vous croyez qu’on rend service à l’Afrique en voulant exporter le blé ou des rejets de poulet bas de gamme congelés pour que les paysans soient plus compétitifs ? », interpelle Marc Dufumier. L’importation massive de soja pour l’alimentation animale montre également que la souveraineté alimentaire de l’Europe est loin d’être acquise. (...)

Depuis les années 90, de plus en plus de spéculateurs ont investi ces marchés. Désormais, on n’échange plus des produits agricoles, mais seulement des produits dérivés pour spéculer sur une baisse ou une hausse de cours. Cette spéculation, ajoutée aux dérèglements climatiques, ont contribué à ce que les prix mondiaux du blé, du maïs, du riz et des oléagineux doublent quasiment entre 2005 et 2007, conduisant aux révoltes de la faim.
Aujourd’hui, la dérégulation des marchés intérieurs ne permet plus aucune stabilité des prix. Ce qui met évidemment en difficulté les producteurs. Mais aussi les consommateurs. (...)

La politique agricole actuelle encourage toujours plus de productions, alors même qu’en Europe des montagnes d’aliments sont gaspillés. Près de 50 % de la nourriture comestible et saine passerait ainsi à la poubelle chaque année [9]. 42 % du gaspillage proviendrait des ménages contre 39 % de l’industrie agroalimentaire, indique une étude de la Commission européenne. (...)

La Food Good March veut changer cette logique de libéralisation de la production et de gaspillage. Ses initiateurs appellent à ce que cette nouvelle politique agricole fournisse des prix stables qui couvrent les coûts de production pour les agriculteurs et des prix équitables pour les consommateurs, soutienne les fermes familiales, valorise le patrimoine culturel, naturel et gastronomique, combatte la spéculation sur les matières premières agricoles et mette fin à l’exportation des produits agricoles en dessous de leur coût de production. (...)