
En Inde, ses feuilles séchées sont utilisées comme soin capillaire ; en Afrique de l’Est, la plante fait office de fourrage ; les Mauritaniens en fument les graines ; et dans les campagnes sénégalaises, où elle est connue sous le nom de leydour, elle est cultivée pour ses vertus médicinales et compense les pertes agricoles dues au changement climatique.
Senna (ou Cassia) italica est une plante vivace à feuilles caduques qui peut-être récoltée tout au long de l’année. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles elle est de plus en plus cultivée dans certaines régions du Sénégal.
Traditionnellement, les paysans du département du Nioro du Rip, dans la région de Kaolack (centre-ouest du Sénégal), cultivent l’arachide, le millet et le maïs, mais les revenus issus de ces cultures sont en recul depuis quelques années. Dans trois villages de la commune de Kaymor, plus de 300 femmes compensent cette baisse en cultivant le leydour à grande échelle.
Bocar Dioum, ancien directeur des services de santé de la commune, se consacre aujourd’hui à des activités de formation agricole dans la région. « Le leydour qui est un facteur de progrès social a radicalement transformé les conditions économique et sanitaire des femmes à Kaymor », a-t-il dit à IRIN. « Devant la chute des rendements agricoles du fait des changements climatiques et le taux élevé de consultations au poste de santé, nous avons trouvé une réponse dans la réhabilitation des plantes médicinales, plus précisément du leydour. » (...)
« Un hectare de leydour rapporte beaucoup plus d’argent que deux hectares de mil et d’arachide réunis avec beaucoup moins d’investissements financiers et d’efforts physiques », a expliqué Cheikh Ndiaye, chef d’un village de la région. « On peut récolter et vendre les feuilles de leydour tous les deux mois alors que le mil ou l’arachide sont saisonniers. (...)
Un secteur touché par le changement climatique
L’agriculture, pilier de l’économie rurale sénégalaise, a été fortement affectée par le changement climatique, et la situation à peu de chances de s’améliorer. D’après Ibrahima Hathie, directeur de recherche à l’Initiative Prospective Agricole et Rurale, un institut dakarois de recherche et de formation en agriculture, les températures dans le centre du Sénégal devraient augmenter de 1,5 à 1,75 degré d’ici 2050, tandis que les précipitations devraient diminuer de 20 à 30 pour cent.
« Les populations sahéliennes vivent au quotidien les impacts […] du changement climatique qui sont ressentis sur la sécurité alimentaire, sur l’accès à l’eau des populations et sur la dégradation des écosystèmes, (...)
Les débouchés potentiels du leydour ne se limitent pas au Sénégal : dans de nombreuses régions du monde, y compris sur les sites de commerce en ligne les plus connus, les feuilles de leydour séchées et écrasées se vendent comme soin capillaire sous le nom de « henné naturel ». Et la production est rapide : deux mois après avoir semé des graines de leydour, on peut déjà en récolter les feuilles, les sécher et les vendre.
Une culture biologique
« Nous n’utilisons pas d’engrais et de pesticides chimiques. Tout est organique », a précisé Mme Deme avant d’expliquer que les attaques de parasites pouvaient être évitées en appliquant de l’huile de neem sur les cultures.
La culture de leydour profite à tout le village, a ajouté Aissatou Touré, elle aussi membre de l’association. (...)
Kany Touré a également signalé un autre avantage : « Le leydour a mis un terme à la coupe de bois abusive dont nous nous nourrissions de la vente […] À présent, nous volons [de] nos propres ailes. » La production annuelle de feuilles de leydour séchées pourrait bientôt atteindre la quantité record de 500 kilos rien qu’à Passy Kaymor, a-t-elle ajouté.
Le succès du leydour s’est propagé à d’autres parties du département et même au-delà de la région de Kaolack, car ces pionnières ont partagé leur savoir-faire ailleurs au Sénégal.