
La Loi sur les services de communication audiovisuelle [Ley de servicios de comunicación audiovisual], promulguée en octobre 2009 par le gouvernement argentin, a finalement été validée dans son intégralité par la Cour Suprême mardi 29 octobre 2013, au terme d’une bataille juridique avec le groupe Clarín [1] qui aura duré près de quatre ans.
Cette loi [2], qui venait en remplacement d’une précédente, adoptée pendant la dictature militaire (1976-1983), affiche l’ambition de démocratiser l’espace audiovisuel argentin, comme nous le décrivions ici même. En se prenant à rêver à ce que de telles dispositions deviennent source d’inspiration pour les parlementaires dans le débat sur la future loi sur l’audiovisuel française, rappelons les grands axes de cette « petite révolution médiatique » [3], et voyons où en est sa mise en œuvre. (...)
L’avis de la Cour suprême est donc venu balayer l’argumentation de Clarín, qui présentait la taille de son groupe et sa rentabilité comme conditions essentielles pour l’exercice de la libre expression. Au contraire, les juges ont estimé qu’ « une loi qui fixe des limites générales a priori est légitime, car elle favorise la liberté d’expression en empêchant la concentration du marché » (...)
Parmi les dispositions anti-concentration prévues par la loi, figurent en effet l’interdiction de posséder plus de 24 licences de câble ou de dépasser 35% du marché, de compter sur une licence de télévision ouverte et par câble dans une même zone, ou que l’opérateur puisse gérer plus d’un seul signal propre de télévision par câble. (...)
Les grands axes de la loi
Une loi combattue de la sorte par un des principaux oligopoles médiatiques d’Amérique du sud mérite bien que l’on rappelle quelques-unes de ses dispositions décisives.
En premier lieu, figurent celles qui ont alimenté ce que l’AFP a qualifié de « bras de fer » entre Clarín et le gouvernement, à savoir la limitation de la concentration dans le secteur audiovisuel et le démantèlement des monopoles (article 161 notamment), comme nous le rappelions ci-dessus (limitation de la concentration des licences, de celle du capital et de l’actionnariat).
L’espace audiovisuel libéré de la domination des grands groupes, peut alors s’opérer un processus de redistribution des formes d’appropriation, de sorte que les médias associatifs sans but lucratifs puissent constituer un tiers secteur à égalité avec les médias publics et privés.
Le texte affiche aussi une volonté d’universalisation de l’accès aux services de communication audiovisuelle (...)
La loi entend créer par ailleurs les conditions d’expression du pluralisme et faciliter la diversité et le reflet des productions locales et nationales.
Le tout devant être garanti par la constitution d’un nouvel organisme de régulation de l’audiovisuel, chargé de l’application de la loi. (...)