
Après l’agression d’une extrême violence de la reporter spécialiste des sujets environnementaux Sneha Barve, le 4 juillet, les autorités indiennes tardent à interpeller les auteurs présumés de ce crime. Reporters sans frontières (RSF) appelle les autorités indiennes à tout mettre en œuvre pour lutter contre l’impunité des crimes commis contre les journalistes.
“Je reprendrai mon travail dès que je serai guérie”, affirme Sneha Barve à RSF, un peu plus de deux semaines après le passage à tabac dont elle a été victime pendant un reportage pour SBP (Samarth Bharat Pariwar), la chaîne YouTube du journal qu’elle a fondé, Samarth Bharat. “Je ne compte pas m’arrêter de lutter contre la corruption”, insiste la reporter spécialiste des sujets environnementaux.
Si la détermination de Sneha Barve reste intacte, les séquelles de sa terrible agression sont loin d’avoir disparues. La journaliste souffre d’une commotion cérébrale, de fractures faciales et de lésions dorsales. Rouée de coups le 4 juillet, elle est restée inconsciente pendant près de 48 heures après l’attaque et est toujours en soins médicaux.
Le jour de cette agression, Sneha Barve se rend dans la localité de Manchar, à l’est de Bombay, dans l’État du Maharashtra, pour une enquête. Alertée par des habitants au sujet d’un chantier illégal, situé dans le lit d’une rivière, menaçant de provoquer des inondations en aval, à l’emplacement d’un marché agricole. Une fois sur place, caméra et micro à la main, la journaliste est rapidement encerclée par une dizaine d’hommes. Parmi eux, apparaît l’entrepreneur responsable de la construction, Padurang Morde. C’est là que le reportage prend une tournure dramatique : Sneha Barve est frappée au visage et dans le dos par ses assaillants à coups de barres de bois, en atteste une vidéo diffusée en ligne. Alors qu’elle est au sol, ses agresseurs continuent de s’acharner sur son corps et menacent de la tuer.
Filmés pendant l’attaque, les suspects restent en liberté (...)
“Les images de l’agression de Sneha Barve sont insupportables. La violence de cette agression contre une journaliste pendant un reportage appelle des sanctions exemplaires contre les auteurs présumés. Ces actes relèvent clairement de la tentative de meurtre et doivent être qualifiés comme telle. RSF appelle à la requalification des charges retenues, à l’arrestation des auteurs présumés de l’attaque et à une enquête impartiale et efficace, permettant de les traduire en justice et ne pas laisser ce crime odieux impuni. Les entraves subies par Sneha Barve pour déposer plainte exigent également une enquête interne aux services de police."
Anne Bocandé, Directrice éditoriale de RSF
Les journalistes environnementaux de plus en plus ciblés en Inde
Depuis le passage à tabac de Sneha Barve le 4 juillet, ses proches sont désormais la cible de campagnes d’intimidation. Selon des informations communiquées à RSF, des membres de l’entourage des agresseurs présumés se seraient rendus dans le village de la journaliste pour menacer verbalement sa famille.
Sneha Barve documente depuis plusieurs années la prédation des ressources naturelles, ainsi que les collusions supposées entre élus locaux et groupes industriels. Pour son travail d’enquête, la reporter a été, par le passé, la cible d’intimidations et de violences. Menacée de mort par un ancien député à partir de juillet 2024 pour avoir fait un reportage critique, sa plainte avait été classée sans suite. En février 2025, elle a été agressée physiquement devant son bureau pour son travail d’information sur le délabrement des routes.
Depuis 2014, au moins 13 des 28 journalistes tués en Inde couvraient des sujets environnementaux, selon RSF, qui a recensé 33 cas de violences contre des reporters environnementaux en Inde depuis 2013. (...)