
Le racisme est omniprésent en santé, comme partout ailleurs. Bien que le monde médical nie, avec une facilité déconcertante, l’incidence du racisme dans la prise en charge des patients ; il suffit d’être dans les services pour voir comment les catégories raciales ne cessent d’être utilisées par les professionnels de santé, et cela de manière naturalisante. Il sera ici question du racisme anti-Roms.
Si certains refusent de soigner les Roms, ou le font en trainant des pieds, c’est parce que les Roms sont affublés de tous les maux, et constitués comme des patients impossibles. (...)
Qu’ils viennent pour des pathologies graves, ou bien pour des pathologies que le corps médical considère pas assez graves pour venir aux urgences, les patients roms sont toujours en tort et perçus comme des parasites. (...)
« Alors que ces patient·e·s "roms" partagent les conditions socio-économiques et administratives de la majorité de la patientèle des services d’urgences, elles et ils sont singularisé·e·s par les médecins urgentistes au moyen d’un processus de racialisation qui invisibilise leur potentielle précarité économique, administrative et résidentielle. ». C’est donc dans une approche culturaliste et raciste que le monde médical entend rendre compte des pratiques de santé et du rapport à la santé des patients roms. Pour le monde médical, si la santé des patients roms est comme elle est, si leur rapport au monde médical est comme il est aujourd’hui ; ce n’est pas le résultat d’une domination raciale et de processus sociaux qui empêchent les patients roms d’accéder à des soins de qualité, mais plutôt, parce que les Roms seraient des Roms. « Les Roms sont ainsi fait » nous dit le monde médical.
Les femmes roms et l’accès aux moyens de contraception (...)
Le rapport de l’Observatoire Européen de Phénomènes Racistes et Xénophobes nous le dit aussi :« Les femmes roms ont en moyenne un taux de fertilité plus élevé et ont leurs premiers enfants très tôt. Elles sont moins susceptibles d’avoir accès à des informations en matière de soins préventifs et de santé sexuelle et génésique. » (p.15). Ce faible accès aux moyens de contraception a pour conséquence un taux plus élevé d’IVG, cette dernière étant le dernier moyen de contraception des femmes roms. « Les femmes roms sont assez demandeuses de contraception, et quand on leur donne la possibilité d’avoir une méthode [contraceptive] c’est quelque chose à laquelle elles recourent. » déclare la socio-démographe Sandrine Halfen au micro de Média Solidaire.
À cette vision naturalisante du monde, dominante dans le système médical, qui voudrait qu’être rom soit un fait de nature il faut opposer une vision sociologique qui met en exergue les logiques sociales de la santé. À l’utilisation raciste de la catégorie « Rom » dans le monde médical, comme ailleurs, il faut substituer une utilisation sociologique de cette catégorie pour mettre en évidence la domination que subissent les Roms, et ce que cela engendre dans leur santé et dans leur rapport à celle-ci. (...)
« Passer de l’une à l’autre vision du monde change le monde, en changeant, notamment, l’idée de la possibilité de le changer que les minoritaires se font. » Tout est dit ! (...)
Ce n’est pas une tâche facile, mais le monde médical se doit de changer son regard sur le monde et sur les patients minoritaires.