
Apparu il y a un demi-siècle, l’usage des neuroleptiques, en dépit de ses piètres résultats, est devenu massif dans la médecine psychiatrique américaine. Il repose sur une vision particulièrement fruste de la maladie mentale, que propage également, au niveau mondial, le répertoire des pathologies le plus souvent utilisé par la profession.
Créée en 2008 à Denver (Colorado), l’entreprise d’imagerie médicale CereScan prétend diagnostiquer les troubles mentaux à partir d’images du cerveau. Diffusé sur la chaîne Public Broadcasting Service (PBS) (1), un documentaire montre le mode opératoire. Assis entre ses parents, un garçon de 11 ans attend, silencieux, le résultat de son IRM (2) du cerveau. L’assistante sociale lui demande s’il est nerveux. « Non », répond-il. Elle montre alors les images à la famille : « Vous voyez, là c’est rouge, ici orangé. Or, ça aurait dû être vert et bleu. » Telle couleur signale la dépression, telle autre les troubles bipolaires ou les formes pathologiques de l’angoisse.
CereScan satisfait aux demandes croissantes d’une société américaine qui semble de plus en plus mal supporter les signes de déviance.
L’entreprise affirme qu’un Américain sur sept âgé de 18 à 54 ans souffre d’un « “désordre” ou “trouble” pathologique lié à l’angoisse », soit dix-neuf millions de personnes (3). Un marché pour lequel elle voit un brillant avenir : CereScan compte ouvrir vingt nouveaux centres à travers les Etats-Unis. Avant de partir à la conquête des cerveaux du reste du monde ? (...)