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Cancers de la thyroïde et Tchernobyl
Article mis en ligne le 8 septembre 2011

Le non-lieu décidé aujourd’hui (7 septembre) par la Cour d’Appel de Paris dans l’affaire Pellerin suscite de nombreux commentaires. L’ancien responsable du Service central de protection contre les rayons ionisants (SCPRI) Pierre Pellerin était le seul mis en examen pour "tromperie aggravée" en 2006 dans cette affaire. Ce qui est assez surprenant étant donné qu’il n’a fait que conseiller un gouvernement qui a pris les décisions. Décisions consistant... à ne pas prendre de précaution particulière pour la consommation de produits alimentaires lorsque Pellerin l’a informé de l’arrivée de l’air contaminé par l’accident nucléaire.

voici quelques éléments sur le fond du dossier traité par la justice : la contamination radioactive due à l’accident nucléaire de Tchernobyl a t-elle provoqué une épidémie de cancers de la thyroïde ? C’est en effet à ce titre que des associations souhaitent que Pierre Pellerin soit poursuivi. (...)

 Dans la zone proche de la centrale, en Ukraine, Bielorussie et Russie, la réponse est oui. (...)

 Dans les autres pays les plus concernés par la contamination - pays baltes, Finlande, Suède, Autriche, Carte dépot tchernobyl Suisse, Italie du nord par exemple - il n’a pas été possible d’observer une telle épidémie - c’est à dire dont la dimension serait clairement reliée à la contamination dans le temps et l’espace et l’intensité reliée à celle de la contamination - chez les personnes âgées de moins de 18 ans à l’époque de l’accident. C’est également le cas en France, comme le montre cette étude de l’Institut de veille sanitaire sur 25 ans de cancers de la thyroïde en France. (...)

 Mais l’affaire n’est pas close. Car si l’effet n’a pas été observé, ce n’est pas seulement parce qu’il aurait pu ne pas exister, mais surtout parce qu’il n’aurait pu être que très petit relativement au nombre de cas attendus hors Tchernobyl. (...)

Pour aller plus loin seules des études dit "cas/témoins" pourraient améliorer la précision du regard. L’ennui, c’est que les véritables "cas" pour lesquels on peut soupçonner un "effet Tchernobyl" sont les enfants qui dans le mois de mai 1986 auraient consommé abondamment du lait de vaches et surtout de chèvres qui elles mêmes auraient brouté une herbe très contaminée. Retrouver ces "cas", et les étudier en comparaison avec des témoins non concernés par la contamination relève du casse tête.
(...)

L’étude jointe au dossier de la juge d’instruction et qui a consisté seulement à tirer au hasard dans les patients d’un endocrinologue corse et à constater qu’il y a plus d’affections thyroïdiennes après qu’avant 1986 ne peut en aucun cas démontrer quoi que ce soit de ce point de vue
(...)

Pourquoi alors, observe t-on une augmentation de l’incidence du cancer de la thyroïde en France ? Cancer thyroïde France (Remarque : de l’incidence mais pas de la mortalité qui est en baisse.
(...)

Pour les médecins, cette augmentation de l’incidence, qui commence bien avant Tchernobyl, et se lit dans toutes les régions et pays de manière complètement indépendante de l’intensité de la contamination radioactive dûe à l’accident, résulte principalement de la détection de tumeurs de plus en plus petites qui n’auraient pas ensuite donné de signes cliniques et que seule une autopsie après décès provoqué par une autre cause aurait pu détecter. Dans la plupart des pays développés, cette augmentation a commencé dès les années 1970. (...)

Pourquoi des responsables politiques (la candidate à l’élection présidentielle Eva Joly, l’eurodéputée Michele Rivasi), et non seulement des militants opposés à l’énergie nucléaire, nient-ils cet état des connaissances et affirment ainsi que le non lieu prononcé est un "déni de justice" car cette dernière aurait eu "la preuve" - affirme Michele Rivasi - du crime de Pierre Pellerin ? Cette attitude consiste à dire "la médecine a raison", lorsqu’elle affirme que les milliers de cancers des enfants russes, ukrainiens et biélorusses sont dûs à l’iode radioactive de Tchernobyl, puis "la médecine a tort" lorsque, par les mêmes outils - épidémiologie, connaissances de l’effet biologique des rayonnements - elle affirme ne pas trouver de trace d’une telle relation en France. Les juges ont été plus logiques et cohérents.

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