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Libération
Sévices à l’établissement catholique Notre-Dame-de-Garaison : « Mon témoignage est politique »
#ecolesprivees #maltraitance #enfants #eglisecatholique
Article mis en ligne le 21 mars 2025
dernière modification le 20 mars 2025

Violenté enfant dans l’établissement catholique digne d’un « Bétharram bis », Renaud Serraz veut briser, pour lui et tous les autres, le « douloureux silence » dans lequel l’a enfermé le déni familial et collectif.

« Vous voilà, cela fait quarante ans que nous avons rendez-vous. » Renaud Serraz, 59 ans, attend sur le quai de la gare Viotte de Besançon (Doubs), en pull marin orange. Sa maison est tout près, avec des volets bleus, en contre-haut de la voie ferrée. (...)

Il attache une grande importance aux mots et aime les choisir avec délicatesse, au plus juste. Sauf peut-être le mercredi 5 mars, quand il écrit à Libération, une fois les enfants couchés. Un message sorti d’un jet, en larmes et sans relecture, « comme si l’enfant encore en moi hurlait, soulagé d’être enfin entendu. » Son couvercle a valdingué en ouvrant le journal. « Je voulais lire les articles sur la situation en Ukraine. Mais en tournant les pages, j’ai tout de suite reconnu. La grille de Notre-Dame de-Garaison, dans Hautes-Pyrénées. Un Bétharram bis [en référence à l’établissement catholique situé à moins de 100 km, où de nombreux anciens élèves ont vécu de graves violences, ndlr]. Je savais. Mais cette fois, c’est dans la presse, donc tout est vrai. Je n’affabulais pas. » Il se revoit, titubant, sortir son téléphone, comme une urgence vitale. « Maman, achète Libé. Tout ce que je vous ai toujours raconté, tout y est. » Françoise, 87 ans et du punch, le rembarre : « Arrête un peu avec cette histoire. Ne m’en parle plus. »

« Quand les murs autour de toi s’effondrent »

Se confier aujourd’hui lui est à la fois salutaire et douloureux. Allongé sur sa méridienne, il se redresse comme un ressort. « Non mais je ne suis pas chez le psy. Vous êtes journaliste. Mon témoignage est politique. » Va pour le fauteuil vert pétant. « Surtout pas d’auto-apitoiement et de pathos », répète-t-il, les doigts sur ses tempes. « Ce que je vous livre aujourd’hui n’a de sens que parce que cela fait société. » Ce sentiment qu’il décrit si bien, que d’autres partagent ailleurs en France. « Quand les murs autour de toi s’effondrent et que tu découvres que d’autres ont vécu la même souffrance. Cette communauté silencieuse », constituée d’hommes pour la plupart, peu habitués à se livrer et encore moins comme victimes. « Si notre parole est entendue aujourd’hui, c’est grâce à MeToo et aux femmes qui témoignent. » (...)

Deux anciens élèves viennent de déposer plainte pour violences aggravées, agressions sexuelles et viols, et une troisième plainte a été déposée contre l’établissement pour complicité. (...)