
On pourrait avoir le sentiment que les révélations récentes de gravissimes violences scolaires puissent augurer un renoncement … pourtant le doute subsiste sur la capacité de la volonté politique à faire cesser des pratiques instituées qui restent fondées sur des conceptions éducatives de soumission.
La multiplication des dénonciations collectives de graves violences agies sur les élèves de Bétharram rend visible une réalité particulièrement inquiétante : nous ne sommes pas face à des actes isolés témoignant de la perversité singulière de quelques individus couverts par leur institution… mais face à des pratiques instituées, admises au sein d’un fonctionnement collectif, ce qui sous-entend leur légitimation éducative. Dans certains établissements privés, cette violence est un mode éducatif.
Si l’histoire de l’éducation a montré qu’il constituait un modèle courant au XIXe siècle[1], nous avions le sentiment que ces stratégies coercitives de sévices et de châtiments étaient désormais devenues intolérables et ne persistaient que dans des agissements individuels isolés.
Nous pensions avoir mis fin, tout au moins dans les conceptions collectives et institutionnalisées, aux représentations qui légitimaient le redressement nécessaire d’une enfance coupable et sa soumission absolue à l’adulte. Force est de constater que la violence pédagogique instituée persiste comme un mode éducatif légitime dans certaines écoles privées. Le soutien qui leur est apporté, y compris après la divulgation de faits avérés, laisse penser que ce dérives sont considérées comme le prix à payer d’une nécessaire fermeté éducative.
Du côté des parents, la demande « de rigueur et de discipline[2] », qui motive pour une part leur choix de ces établissements privés, accorde, de ce fait, une telle confiance aux principes d’ordre promis par l’établissement qu’elle les rend sourds et aveugles aux dérives qu’ils génèrent.
Du côté de l’institution scolaire, le « pas de vagues » produit une sorte de négligence ou tout au moins de superficialité du contrôle qui se satisfait du déclaratif et cherche à éviter tout conflit qui pourrait nuire à l’image de l’établissement. On se méfie du discours des victimes et on se satisfait des attestations de confiance prodiguées par élus ou notables.
Or désormais, nous savons (...)
Éric Nicollet, secrétaire général du syndicat des inspecteurs de la FSU (SUI-FSU), a montré[4] qu’il faudra 10 ans, vu le rythme annoncé, pour parvenir à contrôler tous les établissements. Et on peut craindre que le modèle avec lequel s’exercera le contrôle n’ait pas été suffisamment remis en question pour que ces démarches soient réellement capables de mettre à jour des dysfonctionnements graves. On continue à avertir les établissements de la date des contrôles et rien n’est prévu pour garantir l’indépendance absolue de ceux qui les mettront en œuvre.
Face au paradoxe d’une institution scolaire qui ne cesse de proclamer ses intentions de bienveillance et d’empathie mais laisse subsister les pires agissements, les assurances données d’un changement sont bien faibles. (...)