
La Méditerranée centrale est l’une des routes migratoires les plus dangereuses vers l’Europe. Plus de 25 000 migrants ont péri lors de cette traversée depuis 2014. Dans ce contexte, quel niveau de sécurité apportent les gilets de sauvetage ? InfoMigrants s’est penché sur la question et s’est entretenu avec deux migrants en Libye.
La mer Méditerranée est d’humeur très changeante. Ce qui peut ressembler à une journée calme et chaude depuis la terre ferme peut se transformer en tempête en haute-mer.
Les vagues, les courants marins et le vent peuvent rendre les traversées les plus courtes très dangereuses.
Régulièrement, les bateaux sur lesquels s’entassent les candidats à l’exil sont à peine aptes à la navigation, d’autres sont construits avec des coques soudées qui peuvent se briser lorsqu’elles sont surchargées ou se heurtent à une succession de grandes vagues.
Enfin, les personnes qui parviennent à rejoindre l’Europe présentent régulièrement des brûlures provoquées par le mélange entre l’essence et l’eau de mer salée qui baigne au fond du bateau. (...)
Quelle sécurité apporte un gilet de sauvetage ?
Nombre de personnes qui cherchent à traverser la mer Méditerranée ne portent pas de gilet de sauvetage, notamment parce que les passeurs n’en prévoient pas pour les passagers.
D’une part, cet équipement peut ne pas être disponible en nombre suffisant, ou bien les trafiquants cherchent à entasser davantage de personnes sur le bateau. En effet, une personne sans gilet de sauvetage prend moins de place que celle qui en porte un.
Et lorsque les passagers se voient offrir un gilet de sauvetage ou qu’ils parviennent à s’en procurer, celui-ci peut ne pas être conforme aux normes de sécurité.
Certains migrants qui se sont vus remettre un gilet avant leur traversée ont expliqué à InfoMigrants qu’il était déchiré et qu’ils craignaient qu’il ne soit d’aucune utilité s’ils venaient à devoir s’en servir. (...)
Des gilets aux normes sont encore plus rares pour les enfants. Pour qu’un gilet de sauvetage ne présente pas de risque pour un enfant, il doit être ajusté à son poids. Faire porter une veste d’adulte à un enfant ne l’aidera pas, de la même manière qu’un gilet conçu pour un bébé ne sera pas utile à un enfant plus âgé. (...)
Même un gilet de sauvetage homologué et en bon état n’est pas une garantie de survie en cas de naufrage.
Malgré des températures de l’air élevées en Méditerranée pendant une grande partie de l’année, les températures de l’eau, même en été, sont fraîches, présentant ainsi un risque d’hypothermie pour les naufragés en l’absence de secours.
L’absence de gilets de sauvetage en Libye
Sami*, âgé de 27 ans, a expliqué à InfoMigrants avoir déjà tenté à six reprises de rejoindre les côtes italiennes depuis la Libye. "Lors de mon dernier voyage, j’ai décidé d’acheter moi-même un gilet de sauvetage parce que je savais à quel point c’était important. Le passeur le savait aussi, mais il s’en moquait. Il ne se souciait que de l’argent". (...)
J’ai payé 30 000 dinars libyens (environ 4 800 euros). J’étais mort de peur. J’avais déjà pris la mer, donc je savais à quel point c’est dangereux".
Selon Sami, "lorsque vous quittez la cachette des passeurs et que vous commencez votre voyage, vous ne pensez pas à la mer, à la noyade ou même à la mort. Votre seule préoccupation à ce moment-là est de ne pas être renvoyé dans la maison des passeurs". (...)