
Tout débat politique concernant le département ultramarin vire sans attendre à la question de l’immigration, comme si le pays n’avait rien d’autre à proposer à l’île pour la reconstruire, y réduire les inégalités et proposer des conditions d’existence dignes aux Mahorais.
Pas un débat, pas une intervention, pas un propos politique n’évoque la situation à Mayotte sans très vite aller sur le terrain de l’immigration. Et très vite ne parle que de ça. Rien que de ça. Il ne s’agit pas de nier le problème. Il existe, et tant que la question de l’accueil des exilés ne sera pas prise en compte, les Mahorais en pâtiront. Le problème, ce ne sont pas les exilés qui débarquent à Mayotte, c’est l’absence de conditions dignes pour les accueillir.
Et comme les conditions d’existence à Mayotte sont déjà parfaitement indignes – accès limité à l’eau potable, électricité défaillante, services publics manquants, habitations de fortune, hôpitaux sous-dotés, etc. –, c’est une compétition de misère que l’on instrumentalise et sur laquelle flirtent beaucoup trop d’irresponsables politiques. (...)
À l’image de la très conservatrice sénatrice Valérie Boyer (LR), qui, interrogée sur l’engagement du pape François en faveur des exilés partout dans le monde, a osé sur Franceinfo : « Dans l’immigration, il y a la souffrance des personnes qui quittent leur pays mais il y a aussi la souffrance des personnes qui accueillent, souvent contre leur volonté, d’autres personnes. Toutes les souffrances, toutes les vies, doivent être prises en compte. » À deux doigts de comparer la situation de personnes persécutées, menacées de mort dans leur pays, par la faim, le réchauffement climatique, ou la guerre, qui traversent parfois les mers et les océans au péril de leur vie, à l’inconfort d’une sénatrice qui ne veut pas « de ça » chez elle. Quelle indécence. (...)
Si Emmanuel Macron est venu avec, dans ses bagages, un plan à 3,2 milliards d’euros, il avoue : « Je suis lucide, ce n’est pas un texte de loi qui réglera la situation. » Et d’aller très vite sur le terrain que lui et ses ministres privilégient : l’immigration. Son plan, au doux nom de « Hurawa wa shaba », qui signifie « mur de fer », promet jusqu’à 35 000 reconduites à la frontière par an. Des flics, des radars et de la fermeté. Du concret.
Pour la hausse des prix liée à l’inflation, les toits manquants, l’accumulation des déchets, les fils électriques à terre, l’accès à l’alimentation et à l’eau, les Mahorais attendront. (...)