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Mediapart
Mafia corse et détournements de fonds publics : une juge en prison
#MafiaCorse #HélèneGerhards
Article mis en ligne le 6 avril 2024

Une magistrate proche d’Éric Dupond-Moretti, soupçonnée de s’être compromise avec la mafia corse et d’avoir détourné plus de 100 000 euros d’argent public, a été placée en détention provisoire, dans la nuit de vendredi à samedi, après sa mise en examen pour une dizaine de délits. Du jamais-vu.

L’affaire est d’autant plus explosive que la magistrate en question, Hélène Gerhards, est réputée proche de l’actuel ministre de la justice, Éric Dupond-Moretti. Selon les propres confidences de la magistrate à Mediapart, le garde des Sceaux lui aurait notamment dédicacé un de ses livres quand il était avocat pour lui dire qu’il rêvait d’avoir une collaboratrice comme elle au sein de son cabinet. (...)

Les noms de Gerhards et de Dupond-Moretti s’étaient par ailleurs déjà retrouvés mêlés dans le passé à un dossier embarrassant, qui s’était terminé par un rappel à la loi pour le futur ministre, sanctionné pour avoir fait pression sur la présidente de la cour d’assises de Bastia en marge d’un procès criminel.

Depuis son interpellation mercredi 3 avril par des enquêteurs de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF), c’est la descente aux enfers pour la juge Gerhards. Le ministre, lui, ne répond pas à nos questions sur ses liens avec elle et son degré d’information concernant l’enquête qui la vise. Il faut dire que les faits reprochés à la magistrate sont d’une particulière gravité et totalement inédits au regard de leur ampleur, comme l’a détaillé le procureur de la République de Nice, Damien Martinelli, dans un communiqué confirmant de précédentes révélations de Mediapart. (...)

« Parmi les services rendus, l’enquête mettait en évidence que la magistrate aurait pu, outre des conseils juridiques, rechercher et communiquer des informations concernant des procédures en cours ou des données issues de fichiers », explique le procureur Damien Martinelli. Qui ajoute : « Ce cercle d’amis entourant la magistrate ne manquait pas de souligner sa profession, cette proximité pouvant apparaître aux yeux de ses membres comme une garantie en cas de difficultés judiciaires tout en démontrant, aux yeux des autres, une capacité d’influence étendue. »

Comme Mediapart l’a déjà raconté, Hélène Gerhards est d’autre part soupçonnée d’avoir usé de sa fonction de juge d’instruction pour délivrer de fausses commissions d’experts à des proches (son ex-mari gendarme ou… des jeunes filles au pair) afin de les rémunérer avec les fonds publics du ministère de la justice, bien réels, pour mener des missions de traduction ou d’analyse informatique fictives. « Au total, le montant global des détournements pourrait être évalué à plus de 120 000 euros », a fait savoir le parquet de Nice.

Des liens hasardeux sont également apparus autour des années 2015 et 2016 entre la juge et l’ancien chef des services de renseignement intérieur Bernard Squarcini, ainsi qu’avec un ancien membre des forces spéciales françaises reconverti comme chargé de mission auprès de l’autocrate congolais Denis Sassou-Nguesso. (...)