
Lucile Peytavin, historienne économique et sociale spécialiste du travail des femmes et autrice de l’essai « Le coût de la virilité, ce que la France économiserait si les hommes se comportaient comme les femmes » est aujourd’hui en charge pour le cabinet Psytel en France du projet Européen de lutte contre les violences sexistes faites aux femmes âgées. Ultime tabou d’une société jeuniste. MARVOW 2.0 est le deuxième volet d’une initiative lancée il y a 3 ans.
Pourquoi le sujet des violences faites aux femmes âgées est rarement abordé ?
Le sujet cumulent plusieurs choses, la 1ère c’est l’opacité sur les conditions de vie des personnes âgées notamment lorsqu’elles vivent dans des établissements spécialisés et le fait qu’elles ne soient plus productives dans la société nous conduit à les considérer comme une charge et non comme des personnes à part entière. Dans l’imaginaire collectif, elles attendent la mort.
Ensuite on découvre l’ampleur des violences faites aux femmes à force de mouvements comme MeToo, mais cela prend du temps en raison du manque de reconnaissance des victimes. On est face à un problème où les femmes âgées vont cumuler ces deux aspects, à la fois elles sont âgées et cumulent des violences sexistes. Cette double invisibilisation explique que c’est un sujet qui n’avait jusqu’à présent pas été abordé en France et pas du tout travaillé. (...)
les grands objectifs sont de développer des réponses multi services en France, faire que la police, la justice, la santé, les services sociaux répondent mieux à toutes ces violences. (...)
Les femmes âgées vont cumuler à la fois des violences sexistes auxquelles peuvent s’ajouter des violences institutionnelles. Le manque de moyens dans les établissements peut conduire le personnel a être maltraitant ou négligent. (...)
la première phase est de travailler avec les professionnels, avec les acteurs de terrain pour améliorer les outils existant de détection et de gestion des cas. Elle prendra fin dans un mois et demi puis nous passerons à la création de ces outils, que nous diffuserons par des formations dans un second temps, le projet va durer 36 mois. (...)
Il y a un manque de data sur la question. En France les enquêtes de victimisation s’arrêtent à 75 ans. L’espérance de vie des femmes en France à la naissance est de 85,2 ans, pour celles qui ont 60 ans on est autour de 27,5 années, ce qui nous portent à 87 ans. Sur tout un pan de la population des femmes âgées nous n’avons pas de données alors que l’on sait que les violences sexistes ne s’arrêtent pas une fois que les femmes ont au delà de 70 ans. Et la statistique dont on dispose est celle sur les féminicides. il faut savoir que les femmes qui ont plus de 70 ans font partie de la deuxième classe d’âge touchée par les féminicides (21%) après celles des 30/39 ans. (22%). (source INSEE). (...)