
Le Conseil d’État français a demandé le rapatriement d’un Ouzbek, expulsé en novembre pour soupçon de radicalisation. La France a été épinglée pour n’avoir pas respectée la mesure de protection dont bénéficiait cet étranger de la part de la justice européenne (CEDH).
Le Conseil d’État enjoint "à l’administration de prendre toutes les mesures possibles pour le réacheminer en France", peut-on lire sur la décision. La justice motive sa décision par le non-respect d’une décision européenne. Depuis mars, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) – la plus haute instance judiciaire sur le continent européen - avait en effet demandé à ce que l’expulsion de cet étranger soit suspendue. Motif : son retour en Ouzbekistan mettrait l’individu en danger. (...)
L’État français est par ailleurs condamné à lui verser la somme de 3 000 euros. Pour rappel, les décisions rendues par la CEDH sont contraignantes. Il est possible de saisir cette cour "en mesure d’urgence" pour demander la suspension d’une expulsion ou d’une extradition. L’État concerné est alors obligé d’attendre que le temps que la CEDH rende sa décision finale.
"Camouflet" pour Gérald Darmanin
"C’est un camouflet tant pour le ministre de l’Intérieur qui avait annoncé ne pas respecter la CEDH que pour le tribunal administratif de Paris qui avait statué en référé" le 16 novembre sur son éloignement, a commenté Me Lucie Simon, l’avocate de l’étranger.. (...)
Selon le ministère de l’Intérieur, interrogé le 1er décembre, les services de renseignement français considèrent son client, âgé de 39 ans, comme "radicalisé" et "très dangereux".
Son expulsion suit la politique de fermeté de Gérald Darmanin à l’égard des étrangers jugés "dangereux". Une politique mise en place après l’assassinat d’un professeur dans un lycée d’Arras le 13 octobre dernier par un islamiste du Caucase. Le ministère de l’Intérieur avait alors décidé d’expulser "systématiquement" les étrangers "dangereux" faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire français.
Soupçonné de radicalisation islamiste, l’Ouzbek avait écopé d’une interdiction administrative du territoire dès avril 2021. Ses dossiers pour demander l’asile – devant l’Ofpra puis la CNDA – avaient tous été rejetés en 2022. Depuis le 23 mars 2022, il était assigné à résidence sur le territoire de la commune de Melun, en région parisienne.
Ce n’est pas la première fois que la justice européenne épingle la France au sujet du traitement des étrangers. Il y a un an, Paris avait été condamnée par la CEDH à verser 5 000 euros à trois familles de demandeurs d’asile, dont la mise à l’abri n’avait pas été respectée en 2018.
Le pays des droits de l’homme a aussi été épinglé 11 fois dans le cadre de la rétention des enfants en CRA.