
Ce samedi 18 mai, plusieurs avocats défendaient le cas de Mitkal* au tribunal administratif de Paris, pour faire reconnaître le caractère d’urgence de sa demande visant à faire évacuer sa femme et ses quatre enfants bloqués à Gaza, malgré les massacres en cours.
L’audience n’aura duré que dix minutes. « Il faut permettre de garantir l’effectivité du droit à la réunification familiale », ont plaidé les avocats Marion Grolleau et Samy Djemaoun (accompagnés des avocates Amel Delimi et Lyne Haigar), ce samedi 18 mai, devant le juge des référés au tribunal administratif de Paris. Et le caractère « urgent » doit être retenu pour l’enregistrement de la demande de l’intéressé et la délivrance d’un laissez-passer consulaire pour ses proches, en l’occurrence son épouse et leurs quatre enfants, coincés à l’intérieur de la bande de Gaza alors qu’ils cherchent à fuir les bombardements israéliens.
La décision du juge des référés n’a pas tardé à tomber, samedi après-midi : elle donne raison au requérant et à ses avocats. « Il est enjoint aux services du ministère de l’Europe et des affaires étrangères et du ministère de l’intérieur et des outre-mer, de réexaminer, dans un délai de 72 heures, l’état de la demande de réunification familiale présentée par les requérants », peut-on lire dans son ordonnance. (...)
Urgence et atteinte grave à une liberté fondamentale
Ici, le juge des référés « reconnaît qu’il y a urgence et qu’il y a une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale », qui résulte d’un « défaut de célérité » dans l’examen de la demande d’enregistrement et d’instruction de la demande de réunification familiale de cette famille. (...)
« Je suis si heureux, je chante de bonheur et ma famille danse de joie depuis que je lui ai annoncé la nouvelle ! », réagit-il à l’annonce de la décision du juge des référés. Ces derniers mois, l’homme ne dormait plus, ne mangeait presque rien et restait prostré à la maison, « branché sur son téléphone pour tenter d’avoir la moindre nouvelle de [sa] famille qui est sous le feu » à Gaza. « Ma vie est très compliquée ces temps-ci. Je sais qu’il peut leur arriver quelque chose à n’importe quel moment. »
L’angoisse de ne pas pouvoir sauver les autres
Le Gazaoui, qui a obtenu le statut de réfugié en France en octobre 2023, savait que la réunification familiale faisait partie de ses droits et a donc très vite enclenché les démarches nécessaires, notamment au vu du contexte de conflit qui ravageait Gaza. (...)
Mitkal repense à son neveu qui, une fois la nouvelle annoncée à la famille ce samedi, lui a demandé : « Quand est-ce qu’on pourra partir nous aussi ? »
Mitkal dit avoir pleuré d’« impuissance ». « Ma mère est diabétique et ne trouve pas de traitement dans le contexte de la guerre. Je ne peux pas imaginer que ma femme et mes enfants vont sortir et elle rester dans cet enfer. » L’une de ses sœurs a vu sa fille mourir dans le bombardement de sa maison. Une autre, habitante du nord de Gaza, n’a pas donné signe de vie jusqu’à présent. « Il n’y a plus de vie à Gaza. Peu importe les conditions d’accueil en France, ce sera toujours mieux que là-bas », conclut-il.
Lors de l’audience, le magistrat n’a pas posé de questions et s’est permis de constater l’absence de l’avocat de la partie adverse, le ministère des affaires étrangères et de l’Europe. Quant au mémoire en défense adressé peu avant l’audience au tribunal, les avocats auraient voulu qu’il soit jugé « irrecevable » : c’est le ministère de l’intérieur qui l’a envoyé, alors que le recours a été déposé contre le Quai d’Orsay. Pour se justifier, l’intérieur a produit un échange de mails entre le consulat de France à Jérusalem et la sous-direction des visas, dans lequel cette dernière dit « s’efforcer de traiter le dossier dans les meilleurs délais », « compte tenu de l’urgence ».