Entre 500 et 800 nervis néo-fascistes – un chiffre probablement jamais atteint par la mouvance d’ultradroite –, ont défilé tranquillement à Paris ce samedi, dans un rituel chorégraphique martial. D’abord interdite, la manif a finalement été autorisée par le tribunal administratif. Ils commémoraient le 30ème anniversaire de la mort de l’un des leurs, le 9 mai 1994, voulant échapper à la police après une manifestation interdite. Une commémoration qui fait ressurgir les fantômes d’un passé embarrassant pour Marine Le Pen, cette époque où elle et son parti étaient proches de ces groupes radicaux, antisémites et... soutiens du Hamas.
« Oh, that’s unbelievable » (« c’est inouï »), s’exclame ce touriste londonien, avec cet air sincèrement choqué qui accentue ses intonations très british, à la vue du spectacle qu’il qualifie de lamentable : des militants, habillés de noir, arborant des symboles fascistes comme la croix celtique, défilant au pas de l’oie, intimidant journalistes et badauds tentant de filmer la scène, obstruant leur champ de vision à l’aide de parapluies. La plupart ont le visage masqué, ce qui est illégal. Le constatant, les forces de l’ordre bloquent l’avancée du cortège.
Famille Loustau : après le grand-père et le père, le fils
Celui qui semble être le meneur proteste, arguant que les militants n’ont pas de cagoule. Il négocie avec une officière, qui laisse finalement s’ébrouer les fachos. Elle glisse au meneur de la manif que « les parapluies (qui servent à empêcher les journalistes de filmer, NDLR), c’est une bonne idée ». (...)
Quand Marine Le Pen défendait des antisémites, soutiens du Hamas !
Ils étaient entre 500 et 800, presque exclusivement des hommes, à arpenter ainsi tranquillement les rues du centre historique de la capitale dont ils ont été les maîtres pendant deux heures, bousculant parfois vigoureusement journalistes ou curieux qui resteraient un peu trop longtemps à leur goût sur leur passage. A plusieurs reprises, ils se sont faits conspuer par des passants sidérés ou révoltés par cette marée brune. (...)
Toute la fine fleur de l’ultradroite violente s’y était donnée rendez-vous : nous avons notamment repéré trois néo-fascistes de Besançon, deux de Clermont-Ferrand, des hooligans de Caen et de Reims (les Mes Os). Également présents, des néofascistes italiens, allemands et hongrois.
Cette manif dite du 9 mai a une histoire longue de 30 ans. Ce passé, resurgi du crépuscule du siècle dernier, c’est tout ce que Marine Le Pen voudrait gommer de son histoire officielle, de ses amitiés de jeunesse et de celle de son parti. (...)
Retour 30 ans en arrière. Année universitaire 1993/1994. Marine Le Pen vient de devenir avocate après des études de droit à la faculté parisienne d’Assas, où elle s’est liée avec des membres du GUD, créée en 1968 pour affronter physiquement les « gauchistes ». Elle sympathise notamment avec Axel Loustau (déjà !) et surtout le chef du groupuscule néo fasciste, un homme qui va beaucoup compter pour Marine Le Pen : Frédéric Chatillon. Chatillon deviendra par la suite un soutien logistique et financier de Marine Le Pen au moins jusqu’à l’an dernier, avant que son profil sulfureux ne conduise Marine Le Pen à prendre ses distances. (*)
Chatillon va réorienter la ligne politique du GUD, jusqu’alors uniquement basée sur l’anticommunisme et l’antigauchisme. (...)
Un slogan plus qu’ambigu : contre qui faire l’intifada à Paris ? Contre le système ? Contre les sionistes ? Contre les juifs ? Les années suivantes, un slogan qui fait florès dans les manifs du mouvement va définitivement lever l’ambiguïté : « Deauville, Sentier, Territoires occupés ! », pour le coup clairement antisémite. (...)
Quand le GUD glorifiait un terroriste du Hamas (...)
Après les familles Loustau et Le Pen, celle de Marion Maréchal (...)
En défilant tous les ans, c’est aussi la mémoire de cette époque que le comité du 9 mai veut honorer. Une mémoire que la désormais dédiabolisée Marine Le Pen, possible future présidente de la République, voudrait effacer à jamais.