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En Syrie, l’immense défi de la restauration écologique du pays
#Syrie #agriculture #ecologie
Article mis en ligne le 16 décembre 2024
dernière modification le 11 décembre 2024

Après la chute de Bachar el-Assad, des agriculteurs espèrent retourner à leurs terres. Il leur faudra restaurer un environnement saccagé par treize années de conflits meurtriers et un demi-siècle de politiques désastreuses.

(...) Cet agriculteur vit dans un camp de réfugiés à Afrin, dans le nord-est du pays. Il travaille à un projet d’agriculture biologique avec d’autres réfugiés de guerre, après avoir été déplacé de sa région natale d’Idlib par les troupes du régime.

« Ils ont détruit ma maison, brûlé une partie de mes oliviers. Ils n’étaient pas juste des criminels contre les humains, mais contre la nature et tous les êtres vivants », dénonce-t-il avec émotion dans la voix. (...)

Pendant des décennies, Hafez el-Assad puis son fils, Bachar, avaient imposé des politiques agricoles d’une main de fer, créant des conditions propices à la guerre civile : monocultures organisées par région, quotas de production, libéralisation à marche forcée et répression féroce de celles et ceux qui osaient s’y opposer.

« Nous n’avions pas le droit de planter ce que nous voulions, seulement certains types de semences. Ces politiques ont appauvri et desséché les sols et créé des problèmes pour tous les agriculteurs », se remémore Abou Bachir. Il a enfin recouvert sa liberté. « C’est même étrange de pouvoir parler de tout cela ouvertement, avant le régime nous jetait en prison et effaçait notre existence si nous le critiquions », soupire-t-il. (...)

L’environnement est la victime silencieuse du conflit syrien. La vague révolutionnaire du printemps arabe de 2011 a entraîné une forte répression du régime d’Assad. Des dizaines de groupes rebelles armés — dont certains djihadistes — se sont, eux, livrés une lutte acharnée pour la mainmise du pays. Résultat : des pillages de ressources, la destruction d’écosystèmes...

« En visant les Yêzidis et d’autres minorités dans le nord-est syrien, l’État islamique a délibérément détruit leur environnement. Au cours du conflit, tous ses acteurs ont utilisé l’eau comme une arme ou encore pratiqué la déforestation » (...)

À ces destructions, il faut ajouter la pollution des armes de guerre et des combats. « Il y a un cocktail explosif de dégâts liés à la guerre, de politiques désastreuses sous le gouvernement Assad, et de facteurs climatiques », souligne l’expert. (...)

« Depuis une vingtaine d’années, on observe une recrudescence de sécheresses terribles, de tempêtes de sable dramatiques, et d’inondations meurtrières. Les réponses du gouvernement Assad, qui a supprimé des subsides aux agriculteurs et surconsommé l’eau pour ses monocultures, n’ont fait qu’aggraver la situation », estime Peter Schwarzstein. Des experts et activistes dénoncent une guerre climatique, voire un écocide. (...)

Une nouvelle ère pour le pays meurtri. « Je vais enfin pouvoir retourner chez moi : dès demain, je vais commencer à replanter mes champs à Idlib », affirme Aaazat Abou Bachir, la joie dans la voix. Comme le reste du pays, il fait maintenant face, avec optimisme, à un futur incertain. Le futur gouvernement, probablement dirigé par les rebelles du groupe islamiste Hayat Tahrir al-Cham et l’Armée syrienne libre, sera-t-il à la hauteur ? (...)