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Mediapart
Dans le Tarn, les ingrédients de la colère agricole sont toujours là
#Tarn #agriculture
Article mis en ligne le 6 novembre 2024
dernière modification le 2 novembre 2024

Plusieurs syndicats agricoles appellent à de nouvelles mobilisations à partir de la mi-novembre. Les mesures promises jusqu’ici sont sans effet et les difficultés s’accumulent. Une crise particulièrement visible dans le Tarn, d’où la protestation est partie l’an dernier.

Cette fois-ci, c’est l’accord avec le Mercosur qui remet le feu aux poudres. À l’approche du G20, mi-novembre, pendant lequel l’accord de libre-échange entre l’Union européenne (UE) et le Mexique, l’Argentine, l’Uruguay et le Paraguay pourrait être signé, les syndicats agricoles prévoient de fortes mobilisations. Cette libéralisation des échanges est une aberration de plus pour le monde de l’élevage, qui n’en finit pas de traverser des turbulences depuis cet été.

Selon cet accord, 90 000 tonnes de viande bovine pourraient arriver sur le marché européen. (...)

Sur la commune de Saint-Gemme, près de Carmaux, Christophe Rieuneau, 37 ans, est éleveur bovin. Il produit du « veau du Ségala », une appellation protégée, label rouge, qui avait réussi, jusqu’ici, à assurer de bons revenus dans le secteur. « Mais aujourd’hui nos veaux ne se vendent pas plus cher que ceux du Massif central. »

Surtout, comme de nombreux confrères en Occitanie, Christophe s’est retrouvé aux premières loges des épidémies depuis deux ans. (...)

« L’an dernier, je n’ai fait que 30 % de mon chiffre d’affaires », calcule l’éleveur, tout en assurant être en train de se « remettre sur les rails » après quatre années difficiles. Ce n’est pas le cas de tous ses collègues, regrette-t-il. « Certains sont en train de dérailler sévère. » Il voit une distance énorme entre les annonces faites en début d’année par le gouvernement Attal et « le ressenti de ceux qui ont les pieds dans la merde ».

« Le Tarn concentre de nombreuses difficultés » (...)

tous les ingrédients de la colère sont encore là, et les récents déplacements sur le terrain de la ministre Annie Genevard et de Michel Barnier n’y ont rien changé. (...)

À la fin de l’été, Jérémie a fini par vacciner ses bêtes, à ses frais, mais il se demande bien de quoi l’avenir sera fait. « Le vaccin actuellement disponible est efficace contre la FCO1, la FCO4 et la FCO8. Mais il existe 32 sérotypes ! » Jusqu’à cet été, il n’avait reçu quasiment aucune information des services sanitaires sur la maladie, alors qu’elle avait fait une première apparition dans la région en 2008, mais semblait avoir disparu ensuite. (...)

La décision brutale, en septembre, du géant laitier Lactalis de suspendre une partie de la collecte dans les exploitations bovines des Pays de Loire et de l’est de la France inquiète particulièrement dans le Tarn. Une partie du département est sur la zone de collecte pour le fromage de Roquefort, et de nombreuses fermes ovines sont en contrat avec Lactalis, aujourd’hui à la tête de la plupart des caves situées dans l’Aveyron voisin. Si, jusqu’à présent, la multinationale n’a pas remis en cause les volumes de collecte sur le lait de brebis, qu’en sera-t-il demain ?

Audrey et Lionel défendent d’autant plus leur modèle qu’il est épanouissant. « On s’éclate et on est contents des choix qu’on a faits » (...)

Pour la coporte-parole du Tarn de la Confédération paysanne, Sandrine Miot, une maraîchère que nous retrouvons sur le petit marché de Saint-Juéry, à côté d’Albi, la question du changement climatique doit aussi s’imposer dans les débats. « Il faut arrêter avec les aides au coup par coup, à chaque aléa, qui ne feront rien contre un monde à + 4 degrés. Les budgets et les chambres d’agriculture doivent accompagner les changements dans les fermes. » (...)

« Le premier ministre nous dit qu’il n’y a pas d’argent… Mais tant que nous n’obtiendrons pas d’aide pour la trésorerie des fermes et des engagements sur les prix, la colère ne retombera pas et nous maintiendrons la pression. » Autrement dit, l’annonce jeudi après-midi par Annie Genevard de la mise en place d’un contrôle administratif unique sur les exploitations, au lieu des nombreux contrôles actuels, ne suffira pas.

Ces deux dernières semaines dans le Tarn, la Coordination rurale a empaqueté des radars et disposé des banderoles marquées de l’avertissement « Tic tac ». JA et FNSEA ont inversé les panneaux de Castres et d’Albi, et chaque jour voit son lot de nouveaux messages à l’entrée des communes. Lundi soir, ils étaient une vingtaine à installer, sur un rond-point à l’entrée de la capitale du département, un épouvantail monumental en bottes de foin. « Agris en survie », peut-on lire. Nul doute que la mayonnaise va continuer à monter jusqu’à janvier.