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Canaries : une grève de la faim contre le tourisme de masse
#Canaries #tourisme
Article mis en ligne le 4 mai 2024
dernière modification le 2 mai 2024

Depuis le 11 avril, onze militants écologistes ont entamé une grève de la faim aux Canaries, pour protester contre le tourisme de masse. Pour le géographe Rémy Knafou, il est urgent de repenser nos modèles touristiques

Ces activistes de l’association Canarias Se Agota (« Les Canaries s’épuisent ») demandent notamment l’arrêt des travaux de construction, à Tenerife, d’un hôtel se déployant sur la plage sauvage de Tejita, ainsi que d’un immense complexe de 420 logements touristiques de luxe dans le port d’Adeje.

Dans la foulée, le 20 avril, des dizaines de milliers de personnes ont manifesté dans les principales villes du territoire afin de protester contre le modèle touristique canarien, délétère pour l’environnement mais aussi pour les habitants les plus pauvres (hausse énorme du prix des loyers, etc.). L’archipel a accueilli près de 14 millions de touristes en 2023, soit 13 % de plus en un an

Pour le géographe Rémy Knafou, professeur émérite de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, spécialiste du tourisme et auteur de Réinventer (vraiment) le tourisme (éditions du Faubourg), la mobilisation actuelle n’a rien d’étonnant. (...)

Rémy Knafou — À ma connaissance, il n’y a pas de précédent en la matière : il me semble que cette grève de la faim de militants écologistes pour lutter contre la construction d’un hôtel est une première aux Canaries, qui explique que cette actualité a mobilisé la presse espagnole, puis internationale.

Cela ne m’étonne pas qu’il y ait, au sein de la population des Canaries, une minorité de personnes qui conteste, au point d’entamer une grève de la faim, le modèle de développement touristique de l’archipel. 40 % de la population vit de ce secteur.

Le modèle développé incarne extrêmement bien le système touristique à l’œuvre dans nos sociétés, à savoir un système irresponsable, non gouverné, sans véritable pilote, et dont la seule finalité est d’augmenter sans arrêt les capacités d’accueil, les flux, les chiffres d’affaires. Il s’agit d’une logique infernale du « toujours plus », dans laquelle les responsables politiques sont eux-mêmes pris. À Lanzarote, par exemple, plusieurs maires ont été condamnés pour avoir donné des autorisations illégales de constructions d’hôtels.

L’ironie de l’histoire, c’est que c’est à Tenerife qu’a eu lieu la première conférence mondiale « tourisme et environnement », en 1989. (...)

Rémy Knafou — À ma connaissance, il n’y a pas de précédent en la matière : il me semble que cette grève de la faim de militants écologistes pour lutter contre la construction d’un hôtel est une première aux Canaries, qui explique que cette actualité a mobilisé la presse espagnole, puis internationale.

Cela ne m’étonne pas qu’il y ait, au sein de la population des Canaries, une minorité de personnes qui conteste, au point d’entamer une grève de la faim, le modèle de développement touristique de l’archipel. 40 % de la population vit de ce secteur.

Le modèle développé incarne extrêmement bien le système touristique à l’œuvre dans nos sociétés, à savoir un système irresponsable, non gouverné, sans véritable pilote, et dont la seule finalité est d’augmenter sans arrêt les capacités d’accueil, les flux, les chiffres d’affaires. Il s’agit d’une logique infernale du « toujours plus », dans laquelle les responsables politiques sont eux-mêmes pris. À Lanzarote, par exemple, plusieurs maires ont été condamnés pour avoir donné des autorisations illégales de constructions d’hôtels.

L’ironie de l’histoire, c’est que c’est à Tenerife qu’a eu lieu la première conférence mondiale « tourisme et environnement », en 1989. Rémy Knafou — À ma connaissance, il n’y a pas de précédent en la matière : il me semble que cette grève de la faim de militants écologistes pour lutter contre la construction d’un hôtel est une première aux Canaries, qui explique que cette actualité a mobilisé la presse espagnole, puis internationale.

Cela ne m’étonne pas qu’il y ait, au sein de la population des Canaries, une minorité de personnes qui conteste, au point d’entamer une grève de la faim, le modèle de développement touristique de l’archipel. 40 % de la population vit de ce secteur.

Le modèle développé incarne extrêmement bien le système touristique à l’œuvre dans nos sociétés, à savoir un système irresponsable, non gouverné, sans véritable pilote, et dont la seule finalité est d’augmenter sans arrêt les capacités d’accueil, les flux, les chiffres d’affaires. Il s’agit d’une logique infernale du « toujours plus », dans laquelle les responsables politiques sont eux-mêmes pris. À Lanzarote, par exemple, plusieurs maires ont été condamnés pour avoir donné des autorisations illégales de constructions d’hôtels.

L’ironie de l’histoire, c’est que c’est à Tenerife qu’a eu lieu la première conférence mondiale « tourisme et environnement », en 1989. (...)

Pourquoi le « surtourisme » est-il, selon vous, un terme peu adapté ?

En tant que scientifique, je ne me retrouve pas dans ce terme, qui est fourre-tout et souvent employé sans discernement. Je préfère parler de « fréquentation excessive » ou de « surfréquentation ».

Cela étant dit, on peut citer trois critères pour parler de ce phénomène. Le premier, c’est lorsqu’une fréquentation excessive remet en cause la conservation d’un lieu, qu’il soit naturel ou culturel. Le deuxième a trait à l’acceptabilité du tourisme par la société d’accueil. (...)

Enfin, le dernier critère pour parler de « surtourisme » est le plus subjectif des trois : quand le nombre de touristes nuit à la qualité de l’expérience touristique des touristes eux-mêmes.

On peut évidemment le regretter, mais les lieux touristiques qui attirent le plus de monde, ceux dont la réputation et la mise en récit sont mondialisés, sont voués à être saturés. (...)

Pour prendre des mesures, il faut du courage politique. Au-delà d’agir directement sur les flux, une marge de régulation qui serait déjà raisonnable à tous points de vue (social, environnemental, économique), serait d’agir sur la capacité d’accueil des lieux en définissant ce que j’appelle un « territoire d’équilibre ». En somme, de définir un nouveau modèle touristique, dans lequel les touristes ont eux-mêmes un rôle à jouer, en changeant leurs pratiques. (...)

Pour l’heure, se contenter de l’existant, on ne sait ni le faire aux Canaries, ni ailleurs.