« J’ai envie de jeter l’éponge » : de nombreux agents et fonctionnaires de l’environnement se disent très inquiets d’une victoire du RN aux législatives.
« La question que je me pose, c’est : “Concrètement, qu’est-ce que je vais faire pendant cinq ans pour l’écologie ?” » Depuis la victoire du Rassemblement national (RN) aux élections européennes et la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin, cette fonctionnaire [*] spécialisée dans les politiques agricoles « stresse ». Qu’adviendrait-il pour les fonctionnaires et agents de l’environnement si l’extrême droite obtenait une majorité aux élections législatives des 30 juin et 7 juillet et entrait au gouvernement ? « On ne sait pas quelles mesures elle ferait passer, si elle va supprimer des postes », se tourmente-t-elle.
Cette inquiétude est partagée par une grande partie des 1 700 membres du réseau écologiste des professionnels de l’action publique, le Lierre. « Qu’ils travaillent au ministère de la Transition écologique ou ailleurs, ils ressentent du désarroi et une démobilisation », observe un membre du réseau (...)
« C’est la sinistrose, raconte une agente. Nous attendions des arbitrages sur de nombreux sujets. Tout est en stand-by. » Le découragement pointe à l’évocation de la séquence politique à venir. « On va encore changer de gouvernement, repartir plus ou moins de zéro. Parfois on a un secrétaire d’État à la biodiversité, parfois non. Il va falloir faire remonter en compétence un nouveau ministre. » (...)
Avec le risque que des politiques, « celles qui nécessitent un portage politique fort, le plan Écophyto, les aires marines protégées, la gestion du loup », soient abandonnées. Voire, en cas de gouvernement d’extrême droite, que des scénarios « catastrophes » surviennent : la suppression pure et simple de l’OFB — déjà une revendication de Laurent Wauquiez et des sénateurs Les Républicains —, voire « la disparition du ministère de l’Environnement au profit d’un ministère de la ruralité par exemple ».Avec le risque que des politiques, « celles qui nécessitent un portage politique fort, le plan Écophyto, les aires marines protégées, la gestion du loup », soient abandonnées. Voire, en cas de gouvernement d’extrême droite, que des scénarios « catastrophes » surviennent : la suppression pure et simple de l’OFB — déjà une revendication de Laurent Wauquiez et des sénateurs Les Républicains —, voire « la disparition du ministère de l’Environnement au profit d’un ministère de la ruralité par exemple ». (...)
« Le RN est un groupe qui vote toujours de manière défavorable sur tous les sujets environnementaux et qui prône une grosse agriculture conventionnelle non conciliable avec la biodiversité », poursuit l’agente de l’OFB.
« Nous sommes nombreux à être inquiets » (...)
nous sommes nombreux à être inquiets, complète l’agente de l’OFB. Une sortie comme celle du Premier ministre en janvier dernier [“Est-ce qu’il faut vraiment venir armé quand on vient contrôler une haie ?”] décrédibilise toute l’action de 3 600 agents. » Elle a aussi été choquée par le silence du gouvernement face aux exactions dont les services de l’État ont été victimes. (...)
« On a peur pour notre liberté d’expression et notre capacité à dénoncer les manquements des politiques publiques, confie le membre d’un collectif de fonctionnaires. Même si la capacité d’écoute du gouvernement actuel est limitée, on avait quand même la possibilité de porter une parole à titre associatif ou syndical. Avec le RN au gouvernement, ça risque de se compliquer fortement. » Cet interlocuteur craint aussi que l’extrême droite mène « une chasse aux sorcières », y compris parmi les fonctionnaires de la transition écologique, pour installer « des gens à sa botte » aux postes stratégiques.
« Le dilemme, c’est partir ou tenir »
Face à ces sombres perspectives, les syndicats s’engagent dans la campagne. (...)
le Lierre a publié l’analyse d’un de ses membres, Jean-François Collin, haut fonctionnaire à la retraite. Ce dernier rappelle les garde-fous qui protègent les serviteurs de l’État — droit à la liberté d’opinion, droit à la protection des lanceurs d’alerte, devoir de désobéissance si l’ordre donné est illégal ou de nature à compromettre gravement un intérêt public. Et rappelle que les fonctionnaires ne sont pas de simples exécutants mais « sont aussi garants de la continuité du service public et de la transmission d’une expérience accumulée ».