
Le juge de la Cour suprême brésilienne Alexandre de Moraes a ordonné, lundi, l’assignation à résidence de l’ex-président Jair Bolsonaro. En cause : des interventions relayées par son camp sur les réseaux sociaux lors de manifestations la veille à travers le pays.
L’étau judiciaire se resserre brutalement sur Jair Bolsonaro. L’ex-président brésilien d’extrême droite a été assigné à résidence lundi 4 août, avant même l’issue de son procès pour tentative présumée de coup d’État, où il encourt plus de 40 ans de prison.
Déjà inéligible jusqu’en 2030, l’ancien chef d’État (2019-2022), 70 ans, se retrouve isolé et entravé comme jamais. Et ce, malgré le soutien du président américain Donald Trump, qui a lancé une guerre commerciale contre le Brésil en représailles à une supposée "chasse aux sorcières" contre son allié. (...)
L’assignation à résidence de Jair Bolsonaro, désormais confiné chez lui à Brasilia, a été prise par le juge Alexandre de Moraes, son ennemi intime en charge de son procès à la Cour suprême. Tout nouveau faux pas entraînera "immédiatement un ordre de détention provisoire", a averti le magistrat.
Fustigeant un "non-respect réitéré des mesures" prises contre lui, le magistrat reproche en particulier à Jair Bolsonaro d’avoir bravé une interdiction de s’exprimer sur les réseaux sociaux. En cause : des interventions à distance de l’ex-président lors de manifestations dimanche à travers le pays, qui ont été ensuite relayées par des personnalités de son camp sur les plateformes numériques. Le capitaine de l’armée à la retraite était le grand absent de ces rassemblements.
Bracelet électronique
Visé par une enquête pour obstruction présumée à son procès, Jair Bolsonaro est contraint dans ce cadre depuis la mi-juillet de porter un bracelet électronique et de rester chez lui soir et week-end. Il lui est aussi interdit de s’exprimer sur les réseaux sociaux, directement ou par le biais de tiers.
Lundi, lui a également été interdite toute utilisation d’un téléphone mobile, le sien ou celui d’autres. Au cours d’une perquisition chez lui, plusieurs appareils ont été saisis, a annoncé la police. Hormis ses avocats, toute visite à son domicile est également prohibée, sauf autorisation préalable.
"La justice est aveugle, mais elle n’est pas idiote", a martelé le juge Moraes, magistrat aussi puissant que clivant.
Drapeau brésilien sur les épaules ou à la main, plusieurs dizaines de partisans de Jair Bolsonaro se sont rassemblés lundi soir à Brasilia, encouragés par un concert de klaxons d’autres sympathisants. La sécurité était renforcée devant la Cour suprême, a constaté l’AFP.
Le champion du courant conservateur dans la première puissance économique d’Amérique latine doit connaître l’épilogue de son procès historique dans les prochaines semaines. Avec sept de ses collaborateurs, il est accusé d’avoir tenté d’assurer son "maintien autoritaire au pouvoir" malgré sa défaite face au président actuel de gauche Luiz Inacio Lula da Silva en 2022.
"Réduire au silence"
L’appui spectaculaire de l’administration Trump n’a jusque-là pas arrangé ses affaires. Le 30 juillet, le département américain du Trésor a infligé des sanctions financières au juge Moraes. Le même jour, le président Trump a officialisé une surtaxe douanière de 50 % sur une bonne part des exportations brésiliennes vers les États-Unis. La mesure entrera en vigueur mercredi. (...)
Le magistrat reproche en particulier à Jair Bolsonaro le fait qu’un échange téléphonique avec son fils aîné Flavio Bolsonaro durant les manifestations en son soutien dimanche ait été relayé sur les réseaux sociaux. Au moment de cet appel, le sénateur Flavio Bolsonaro haranguait des milliers de manifestants à Rio de Janeiro. "Le non-respect flagrant des mesures a été tellement évident que le fils de l’accusé a décidé de supprimer la publication de son profil sur Instagram, dans le but d’occulter la transgression", a pointé le juge.
Pour lui, l’ancien président est un récidiviste : l’interdiction d’utiliser les réseaux sociaux - critiquée au-delà même de la mouvance bolsonariste, parmi la presse et les juristes - avait été selon lui contournée une première fois après l’imposition du bracelet électronique. Il avait alors averti que le couperet tomberait en cas de répétition. (...)