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Mediapart
Aides sociales et recours juridiques : comment Strasbourg résiste à la loi immigration
#immigration #discriminations #desobeissancecivile #resistance #Strasbourg
Article mis en ligne le 7 janvier 2024
dernière modification le 6 janvier 2024

Jeanne Barseghian, maire de la capitale alsacienne, a annoncé entrer en « résistance » contre la loi immigration et intégration. La municipalité participe à une saisine du Conseil constitutionnel et étend ses aides sociales communales aux personnes sans papiers.

« L’adoption de cette loi marque un recul sans précédent des droits des étrangers. » Dans un entretien à France Inter, dès le jeudi 21 décembre, Jeanne Barseghian (Les Écologistes) a annoncé que sa municipalité entrerait « en résistance » contre la loi sur l’immigration, à l’instar de 32 départements de gauche. (...)

L’élue écologiste dénonce surtout les mesures de « préférence nationale », inspirées du programme du Rassemblement national et visant à différer l’accès à certaines aides sociales pour les personnes étrangères qui s’installent en France – jusqu’à cinq ans pour certaines. (...)

Jeanne Barseghian participe à l’opposition à la loi immigration tout d’abord en tant que coprésidente de l’Association nationale des villes et territoires accueillants (Anvita), une association créée en 2018 qui regroupe 70 collectivités territoriales favorables à l’accueil inconditionnel des exilé·es en France. Car la « résistance » municipale se traduit sur le plan juridique par deux contributions extérieures aux saisines du Conseil constitutionnel. Celui-ci a été saisi quatre fois sur la constitutionnalité du texte, dont une par Emmanuel Macron lui-même. (...)

Dans une seconde contribution extérieure, déposée par l’Anvita le 3 janvier 2023, les élu·es contestent la compétence de l’État à décider de la tarification des transports en commun (...)

Les maires arguent également que la fin de l’accès inconditionnel à l’hébergement d’urgence est contraire au préambule de la Constitution, aux principes d’égalité, de fraternité et de dignité humaine.

Lier le national et le local (...)

« Nous accueillons les étrangers dans nos services publics, à nos guichets, tous les jours. Pour nos collectivités, ces personnes ne sont pas juste des chiffres ou des statistiques. Ce sont des femmes, des hommes et des enfants, qui risquent de subir les conséquences concrètes de ce texte s’il n’est pas censuré par le Conseil constitutionnel. »

Parmi les « conséquences concrètes », elle évoque le risque d’augmenter le nombre de personnes à la rue si celles-ci n’ont plus accès à l’hébergement d’urgence. (...)

Pour Floriane Varieras, adjointe municipale chargée des solidarités, l’adoption de la loi immigration est « frustrante » et sa temporalité, « anachronique » : « Le 12 décembre [soit sept jours avant le vote de la loi – ndlr], nous avons voté en conseil municipal l’élargissement de l’aide sociale communale aux personnes sans papiers. Il faut désormais simplement que les personnes justifient de six mois de présence à Strasbourg. Elles n’ont pas besoin d’avoir un titre de séjour pour en bénéficier. » (...)

Ces aides existent depuis des lois de 1908 et 1909 et leur distribution était régie par un guide du 21 novembre 2011. (...)

L’aide se divise en deux volets : une aide aux besoins de première nécessité, qui permet de « répondre aux besoins primaires » tels que « l’alimentation et l’hygiène » et une aide « au projet ». Toutes deux sont destinées à des personnes qui vivent avec moins de 250 euros par mois, une fois leurs frais fixes payés.

Cette délibération a été votée à l’unanimité par les conseillères et conseillers de la ville. Elle a pris effet le 1er janvier 2024. (...)

La ville a déjà mis en place une tarification solidaire, voire gratuite pour les cantines. Le dispositif est basé sur les revenus des parents, et non conditionné à leur situation administrative.

Cette aide sociale communale est la seule qui dépend des compétences de la ville. « Nous ne sommes en charge ni du RSA, ni de l’Allocation adulte handicapés, ni des allocations-chômage », poursuit Floriane Varieras. Strasbourg n’a donc pas d’autre « levier direct » pour contrer les effets de la loi immigration, estime l’adjointe. (...)

Lorsque les gens n’ont plus rien, ce sont dans les services d’accueil de jour que nous gérons qu’ils se retrouvent. (...)

Ces accueils de jour à destination des personnes pauvres ou sans abri comme les centres communaux d’action sociale (CCAS) ou la T’rêve « ne trieront jamais celles et ceux qui peuvent y accéder en fonction de leur situation administrative », assure Jeanne Barseghian. (...)

En attendant que le Conseil constitutionnel se prononce sur la loi immigration et intégration, Jeanne Barseghian refuse d’envisager que le texte soit appliqué en l’état. (...)

« S’il y a des mobilisations dans la rue contre cette loi, la ville sera représentée », explique-t-elle, citant un appel national à manifester le 14 janvier.