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Madame Figaro
Vieillir autrement, Chez les Babayagas de Montreuil
Article mis en ligne le 11 janvier 2013
dernière modification le 7 janvier 2013

Bien vieillir grâce à un mode vie solidaire. Voilà le pari que se sont lancées ces habitantes de Montreuil-sous-Bois en ouvrant la Maison des Babayagas. Mise sur pied pour des retraitées à faibles revenus mais avec une forte envie de partage, cette structure d’habitation autogérée est une initiative unique en France. Reportage.

(...) Thérèse Clerc a souhaité que cette maison, fondée sur l’autogestion et la solidarité, ne s’adresse qu’aux femmes : « les hommes ne restent pas veufs, ils trouvent généralement une seconde épouse plus jeune pour s’occuper d’eux », lance-t-elle, l’œil malicieux. « Le regard de la société est différent envers les femmes : passé un certain âge nous ne sommes plus considérées », reprend Thérèse, 85 ans. Après une vie à éduquer les enfants et s’occuper de leurs maris, les Babayagas revendiquent le droit à la tranquillité et s’affranchissent des contraintes qui étaient encore les leurs quelques années auparavant.

(...) Au début, cette utopie, pas grand monde n’y croyait. Thérèse a tenté de convaincre les pouvoirs publics de financer son projet, mais les portes se sont fermées les unes après les autres. Le déclic institutionnel a eu lieu après la canicule de 2003 qui a fait 19 500 morts parmi les plus de 75 ans. Jean-Pierre Brard, l’ancien maire de Montreuil leur a alors proposé le terrain, idéalement situé en centre ville.

(...) Christine Boutin, à l’époque Ministre du logement et l’une des premières à soutenir les Babayagas, a octroyé à l’association 4 millions d’euros. La caisse des dépôts et l’OPHLM ont financé le reste.

Les conditions d’entrée dans ce lieu de vie unique sont claires : partager une idéologie féministe et avoir milité au sein d’une association ou d’un collectif. Vouloir simplement se rapprocher de ses enfants n’est pas suffisant. Pour Thérèse, qui a également fondé la Maison des Femmes de Montreuil, il est fondamental d’avoir eu une expérience de groupe. Seul bémol, la maison n’étant pas médicalisée, les aspirantes Babayagas doivent être en bonne forme morale et physique. D’ailleurs, chaque membre doit désigner une personne extérieure qui prendra les décisions nécessaires en cas d’incapacité de sa part. Thérèse le concède, « ce n’est pas toujours facile de vivre avec des vieilles ! » La bonne marche du groupe, qu’elle compare à un couple, repose sur des compromis. Alors, pour rester soudées, les Babayagas organisent tous les trimestres une « colonie de vacances », souvent en Bourgogne, pour partager autre chose que le quotidien. « L’important, dit-elle, reste de démontrer que l’on peut vieillir autrement. » (...)

Le projet qui tient particulièrement à cœur à Thérèse, c’est l’université populaire, qui devrait prochainement voir le jour. Parce qu’ « il faut secouer les vieux, qu’ils arrêtent de ne jouer qu’au Scrabble et à la crapette », elle a tenu à faire des deux salles communes du rez-de-chaussée un lieu d’activité intellectuelle et de bien être. Il y aura des conférences avec des interventions du cercle de réflexion féministe Émilie du Châtelet, mais pas seulement. Séances de gym douce, ergothérapie, massages… Tout pour que les Babayagas puissent rester alertes et autonomes, pour démontrer que « la vieillesse, c’est le bel âge de la vie. » (...)