
En 2017, l’entreprise Renault aura donc dégagé un résultat de 5 milliards d’euros, un bénéfice record, tandis que la SNCF, avec environ 50 milliards de dette, est présentée comme en quasi-faillite. En France, les ventes des constructeurs automobiles progressent fortement ( + 4,7% en 2017), souvent d’ailleurs à la grande satisfaction des commentateurs, tandis que le transport collectif est en crise.
A l’heure du réchauffement climatique, de l’engorgement des métropoles par la bagnole, et des problèmes sanitaires engendrés par les particules fines, cette situation est à la fois scandaleuse et effrayante. Deux ans après la COP 21 et des engagements pris la main sur le cœur, il s’agit là d’une forme de reniement collectif ; mais c’est surtout le fruit empoisonné d’une politique des transports aberrante et irresponsable qui n’offre pas d’alternative attrayante et accessible financièrement au déplacement automobile dont les coûts écologiques cachés, les externalités, ne sont pas véritablement pris en compte.
Depuis des années, la SNCF n’a plus qu’un seul crédo : la grande vitesse. Les énormes investissements qui ont été nécessaires pour mettre en place les infrastructures et faire circuler les TGV ont fragilisé l’entreprise financièrement et ont totalement perverti sa mission de service public. Une politique tarifaire élitiste et incompréhensible, un réseau en étoile privilégiant les liaisons Paris-province, des liaisons transversales délaissées voire abandonnées, un entretien défaillant sur tout le réseau secondaire, etc, ont abouti à faire de la SNCF un monstre déséquilibré, dédié avant tout au service des hommes d’affaires et des cadres des grandes agglomérations.
Depuis des années, la SNCF ignore les besoins des populations rurales mais aussi banlieusardes.
Depuis des années, c’est la machine TGV qui commande l’ensemble de la structure.
Le mal est profond, bien ancré. Et le rapport de Jean-Cyril Spinetta, loin de proposer des remèdes, veut au contraire accentuer une logique qui ne peut qu’aboutir à la disparition définitive du rail en tant que service public
La SNCF doit s’adapter. Elle doit s’adapter à la concurrence, à la loi du marché, à l’impératif de rentabilité. Dans un tel système, le statut de la SNCF et du cheminot sont évidemment obsolètes, dépassés. La privatisation se profile à l’horizon, elle est de toutes façons réclamée par Bruxelles !
La justification des réformes est toujours donnée par des chiffres, des évaluations, des normes, des directives libérales européennes, mais jamais par des exigences humaines.
Le transport des voyageurs va être définitivement asservi à la recherche du profit. Le principal va suivre ce qui devrait être accessoire. Dans tous les domaines, une seule question semble désormais présider aux choix politiques (à l’exception de l’armée et de l’industrie du nucléaire) : est-ce rentable ou pas ? Bien évidemment, tout le scénario en découle !