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Rue 89
Un printemps social né sur Internet gagne l’Espagne
Article mis en ligne le 19 mai 2011

Le mouvement de mobilisation surprise est né ici il y a trois jours et a déjà pris une envergure nationale, que des centaines de personnes s’activent à canaliser. Du même coup, l’agenda des médias et des partis politiques s’en est trouvé bouleversé avant les importantes élections municipales et régionales du 22 mai.

De mémoire d’Espagnol, « on n’avait pas vu ça depuis le début de la démocratie [en 1978, ndlr] », concordent plusieurs journalistes présents.

Certains n’hésitent pas à comparer la Puerta del Sol à la désormais fameuse place Tahrir du Caire.

Il y a trois mois, un groupe de blogueurs et d’internautes se rencontrent sur Internet et fonde une plateforme en ligne qu’ils baptisent « Democracia Real Ya » (« Une vraie démocratie, maintenant »).

Petit à petit, plusieurs centaines de petites organisations les rejoignent en ligne : l’Association nationale des chômeurs, la plateforme des familles endettées par les prêts immobiliers, Jeunesse sans futur, un collectif formé début avril, Attac, les anti-loi Hadopi à l’espagnole, des abstentionnistes convaincus, etc

Pendant des semaines, dans l’indifférence complète des médias – à quelques rares exceptions près – et de la sphère politique, plus de 200 organisations préparent ensemble une série de manifestations prévues le 15 mai dans 50 villes d’Espagne avec un mot d’ordre :

« Nous ne sommes pas des marchandises aux mains des politiques et des banquiers. »

Dans son manifeste, la plateforme Democracia Real Ya revendique le fait d’être constituée par des gens « normaux », de tous horizons. Ses membres parlent des lacunes de la loi électorale espagnole qui favorise le bipartisme, dénoncent la corruption, les problèmes d’accès au logement, le chômage, la crise…

Ils sont finalement plus de 60 000 à manifester à Madrid selon les organisateurs, 25 000 selon les autorités. Près de 15 000 à Barcelone et plusieurs milliers dans le reste de l’Espagne.

Les quotidiens espagnols qui n’avaient pas prévu une telle ampleur du mouvement se pressent dimanche soir de faire de la place dans leurs unes du lundi pour l’événement surprise.

Pendant ce temps, sur la place de la Puerta del Sol qui fait face au gouvernement régional mené par les conservateurs du Parti populaire (PP), plusieurs centaines de manifestants votent en faveur d’y camper. Ils ne sont finalement qu’une cinquantaine à y passer la nuit.

Le lendemain, lundi, le mouvement commence à faire tâche d’huile dans d’autres villes. C’est l’un des sujets les plus commentés sur Twitter à l’échelle mondiale. Une nouvelle nuit de camping s’improvise à Madrid. (...)

Chose rare en Espagne : on débat dans le calme

A Madrid, plus d’un millier de personnes s’organise en assemblées dès le début de la soirée. Ils y débattent des propositions à concrétiser, de la façon dont ils doivent exprimer leur mécontentement auprès des partis, des infrastructures et de la nourriture, de la propreté… (...)

Pour un pays où l’on est habitué à crier lors des débats et à se couper la parole, le civisme des discussions a de quoi interpeller : chacun attend son tour pour parler dans le silence alors que les assemblées dépassent parfois la centaine de personnes. (...)

Après une nuit et une journée de débats, ils dévoilent finalement un manifeste mercredi soir.

Après un premier moment d’hésitation, tous les partis politiques espagnols font allusion ces jours-ci au mouvement de protestation. Mais la plupart semblent désorientés. (...)

Malgré une présence policière plus insistante que la veille, ils étaient encore des milliers rassemblés mercredi à 20 heures sur la Puerta del Sol. Un cri de joie a accueilli l’annonce qu’un petit campement s’organisait aussi à Paris.

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