
L’évêque d’Arras a co-signé une déclaration avec le Secours catholique sur le sort des migrants à Calais. Les chrétiens de Calais le soutiennent avec une lettre ouverte au préfet.
Après la rencontre de Mgr Leborgne, évêque d’Arras, auprès des migrants, les chrétiens de Calais (Pas-de-Calais) ont écrit au préfet du Pas-de-Calais une lettre ouverte. Le but : faire évoluer la manière dont sont traités les demandeurs d’asile par les autorités. Avec des mots forts à la suite de ceux de l’évêque d’Arras : les exilés sont « traités pire que des chiens ».
Coup de gueule
Le 3 mars 2021, Olivier Leborgne, évêque du diocèse d’Arras et Véronique Fayet, présidente du Secours Catholique – Caritas France, ont fait une déclaration commune sur la situation des exilés à Calais. Ce texte espérait une réponse des autorités publiques. Mais ce sont les catholiques de Calais qui s’en sont emparés, pour appuyer les dénonciations et défendre la dignité de l’homme mise terriblement à mal à Calais depuis de nombreuses années.
Mercredi 3 mars, Véronique Fayet, présidente du Secours Catholique, et Mgr Leborgne, évêque d’Arras, se sont rendus à Calais, à la rencontre des exilés. Un texte puissant est sorti de cette visite avec deux axes : une dénonciation sans fard de la maltraitance quotidienne infligée aux migrants ; et des propositions pour sortir de ce marasme humanitaire.
On pourrait appeler cela un coup de gueule comme de temps en temps il est nécessaire de la faire devant l’injustice et l’immobilisme. Ces dernières années, il y en a eu plusieurs, venant de tous les bords, de toutes les associations présentes sur place. Des députés sont montés au créneau, la commission des droits de l’homme et même les experts des Nations Unies aussi. Rien n’y fait. (...)
« Expulsés », c’est le mot gentil pour décrire la réalité que toutes les associations expliquent, qui ressemble plus à du harcèlement, policier et institutionnel. Alors, y’en a marre. Cette fois, ce sont les chrétiens qui se mouillent, et au premier chef leurs représentants. (...)
Car si les migrants sont traqués, les associations sont aussi empêchées de faire leur travail, si petit soit-il, si nécessaire soit-il pour nourrir, réchauffer, soigner. « On nous a obligés en février 2020 à fermer notre lieu de répit dit La Crèche, qui malgré nos tentatives de réouverture, reste fermé. Et nous en sommes au huitième arrêté de la mairie de Calais interdisant la distribution de nourriture gratuite à Calais ».
Le lieu dit la Crèche n’est autre que la Maison du doyenné, rue de Croy à Calais, devenue en décembre 2020 la halte de nuit d’une poignée de migrants. La commission de sécurité l’a estimée dangereuse pour l’accueil, obligeant sa fermeture deux mois plus tard.
Bras-de-fer ?
Un bras de fer entre les chrétiens, la mairie et la préfecture est-il en train de pointer son nez ? En tout cas, les chrétiens de Calais ne veulent plus se taire. Ils ont décidé de faire front avec leur évêque. Une lettre ouverte circule depuis le 22 mars 2021, pour interpeller massivement le préfet.
Là encore, pas de politiquement correct. (...)
L’équipe qui a lancé cette lettre ouverte est celle qui étudie la lettre du pape François « Fratelli Tutti », « Tous frères ». Chantal Pachurka explique : « Depuis décembre 2020, nous sommes 8 à nous réunir tous les 15 jours autour de ce texte, en 8 chapitres. Une partie concerne les migrants. On s’est demandé quoi faire pour être en cohérence avec ce que dit le pape… »
C’est ainsi que la lettre est née. « Nous voulons inonder le préfet de courriers, pour que les choses changent. On ne sait pas si cela aura de l’effet, mais on ne peut pas rester muet ».
« Pire que des chiens »
Dans cette lettre, l’émotion est palpable : « Nous ne pouvons rester indifférents à ce qui se passe. C’est pourquoi, nous voulions vous faire part de notre désarroi. Aujourd’hui, ces personnes sont ‘traitées pire que des chiens’. Aucun être humain ne peut accepter ça. Or, la fraternité est inscrite dans notre devise nationale ; par conséquent et légitimement nous nous posons la question, sommes-nous en train de nous en éloigner ? »
Ils proposent aussi de rencontrer les services institutionnels compétents (...)
Plusieurs, dont le Secours catholique, en sont venues à multiplier les démarches juridiques contre l’autorité publique. Les arrêtés municipaux d’interdiction de distribution alimentaire sont contestés par voie pénale. Même le préfet du Pas-de-Calais est assigné en justice pour le démantèlement d’un camp de migrants en septembre 2020.
Mais tout cela n’arrête pas le rouleau compresseur d’une politique sans âme (...)
Depuis trois semaines, quel retour le Secours catholique a eu de ce texte, de la mairie, de la préfecture, des autorités ? Aucun. Silence radio. Nada.