
Le vote des écologistes en faveur d’une loi qui prévoit de nouveaux moyens de répression contre les contrefaçons a suscité beaucoup de réactions. Car en l’état, la production à la ferme par un agriculteur de ses semences constitue une contrefaçon. Basta ! a souhaité revenir sur les raisons de ce vote dans un entretien avec Hélène Lipietz, sénatrice écologiste. « Nous ne pouvions rien faire dans une loi de procédure pour modifier une loi de fond », explique-t-elle. A part obtenir la garantie que ce point sera traité dans le cadre de la loi d’avenir agricole, examinée en janvier 2014 à l’Assemblée nationale. « C’est là, assure t-elle, qu’il va falloir mettre la pression et faire du lobbying ».
Basta ! : La loi sur les contrefaçons a été adoptée à l’unanimité le 20 novembre. Le groupe écologiste avait pourtant émis des réserves en déposant des amendements pour en exclure les semences de ferme [1]. Cette loi représente-t-elle un danger pour les agriculteurs, arboriculteurs ou maraîchers qui utilisent leur propres graines pour en faire de la semence ?
Hélène Lipietz [2] : Ce n’est pas cette proposition de loi qui présente un danger, mais les marchandises contrefaites qui peuvent se révéler très dangereuses pour leurs utilisateurs. Cette proposition de loi concerne toutes les contrefaçons – les freins de voiture, les médicaments, les produits de luxe ou encore le matériel électronique – et pas l’agriculture en particulier. Les problèmes de contrefaçon agricole doivent représenter à peine cinq lignes sur un rapport [3] de quatre-vingt pages...
Ces quelques lignes sont néanmoins importantes : la répression de la contrefaçon, en étant étendue à l’ensemble des branches de la propriété intellectuelle, y compris aux « obtentions végétales » et donc aux semences de ferme, peut s’abattre sur les agriculteurs qui ressèment des variétés sélectionnées par l’industrie semencière.
Nous avons reçu des propositions d’amendements émanant du Réseau semences paysannes et de la Confédération paysanne. J’ai été la première à relayer la question des semences de ferme, car je sais que c’est un problème. La loi a été votée en plusieurs morceaux : la loi de fond sur la contrefaçon en 2007, puis la loi sur les certificats d’obtention végétale (en 2011, ndlr). La proposition de loi examinée le 20 novembre modifie certaines procédures de saisie pré-judiciaire dans le domaine de la contrefaçon. Ce n’est pas une loi de fond mais de procédure. Ce qui signifie qu’on ne peut faire des amendements que sur la procédure, et non sur le fond.
Consciente qu’il y a un problème sur les semences, j’ai cependant déposé un « amendement d’appel », pour signifier au gouvernement qu’il ne faut pas oublier cette question (lire l’intervention au Sénat). Le gouvernement a répondu que j’avais raison de le rappeler et que ce point sera traité dans le cadre de la loi d’avenir agricole, qui est une loi de fond (examinée en séance à l’Assemblée nationale en janvier 2014, ndlr). Je ne peux que prendre acte. Ma mission d’alerte a été claire et je ne peux pas aller plus loin. (...)