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Libération
Sécurité alimentaire et guerre en Ukraine : la productivité agricole en question
Article mis en ligne le 13 mai 2022
dernière modification le 12 mai 2022

Alors que des grandes puissances agricoles mettent tout en oeuvre pour produire davantage afin notamment de faire face au choc provoqué par le conflit, un rapport d’experts les accusent de faire fausse route.

Pour répondre à « l’ouragan de famine » craint par l’ONU en raison de la guerre en Ukraine, les grandes puissances alimentaires vont produire encore plus de denrées agricoles. « Nous nous engageons à travailler ensemble pour assurer qu’il y ait de la nourriture en quantité suffisante pour tout le monde, y compris les plus pauvres, les plus vulnérables et les personnes déplacées », ont annoncé les 51 membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ce vendredi, dont l’Union européenne, les Etats-Unis, l’Australie et le Canada. Selon la FAO, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, 8 à 13 millions de personnes supplémentaires pourraient souffrir de sous-nutrition dans le monde en 2022-2023. (...)

Dans ce contexte, les appels à produire plus se multiplient. Remettant en cause les objectifs verts européens, qui prévoient de réduire l’usage des pesticides et d’augmenter les surfaces en bio, Bruxelles a autorisé fin mars sous impulsion de la France… (...)

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(...) La guerre en Ukraine rappelle ainsi que l’agriculture et la sécurité alimentaire sont immensément géopolitiques. Aujourd’hui, la dépendance de nombreux pays envers les exportations russes et/ou ukrainiennes pose des questions stratégiques. L’Europe tâche de corriger sa stratégie du pacte vert au niveau agricole pour se réarmer sur la production et les exportations. Toutefois, le coût des engrais a été multiplié par 4 en 1 an et ceux de la production agricole en Europe n’ont fait qu’augmenter. Beaucoup d’agriculteurs européens ne peuvent plus produire davantage et ne peuvent pas à ce stade remplacer le blé d’origine ukrainienne et russe.

L’Europe se situe à un carrefour de sa politique agricole, sachant que si elle décide de relancer sa production agricole, les résultats attendus ne seront visibles qu’à la fin de la décennie. En attendant, les pays doivent faire face à une instabilité mondiale croissante qu’il faut regarder avec préoccupation.

L’UE doit rester forte sur son ambition climatique et continuer à pousser les transitions de pratiques agricoles pour produire mieux avec moins. Elle doit cependant continuer en parallèle à produire et peut-être même à produire plus. Ce capacitaire à entretenir ou à renforcer ressemble aux défis du secteur de la défense. Si vous baissez la garde, si vous réduisez les investissements et si vous êtes en décroissance productive, vous augmentez les vulnérabilités stratégiques. L’agriculture européenne doit conjuguer cette question capacitaire avec le défi environnemental. Pas l’un ou l’autre, mais les deux ensemble nécessairement. C’est cela qui doit animer le débat en ce moment : comment faire l’un et l’autre et pas l’un contre l’autre. Dans un monde où l’insécurité physique revient sur la table des Européens, c’est indispensable.