
En fin de service, il reste souvent du pain ou des légumes sur les plateaux repas dans les restaurants universitaires. Une perte de denrées non négligeable qui coûte de l’argent. Les Crous et étudiants engagés tentent de trouver des solutions pour sensibiliser personnel des cantines et pensionnaires des établissements.
Vous sortez de cours, vous avez un petit creux. Normal, il est plus de midi, l’heure du déjeuner. Vous avez deux heures devant vous, avant la reprise d’un cours magistral. Que faire ? Grâce à votre smartphone, en quelques instants, vous apprenez que le restaurant universitaire (RU) le plus proche est bondé. Vous prenez donc la décision de retarder votre venue à la cantine pour éviter la queue et profiter de votre repas dans de meilleures conditions. Le lendemain, à la même heure, votre mobile vous informe du menu de tel RU. Cela ne vous convient guère et vous vous rendez dans un autre établissement servant des plats à votre goût. Et ce, en compagnie d’amis, dont la présence a été notifiée par votre mobile.
Cette scène n’est pas une fiction, elle pourrait même avoir lieu dans quelques mois, lorsque l’application mobile anti-gaspillage alimentaire What the food aura été lancée en phase de test dans trois RU parisiens (...)
Aucune étude globale et nationale n’a été menée dans les RU de France pour mesurer l’ampleur du gaspillage alimentaire, mais de nombreuses personnes agissent à l’échelle d’un campus. C’est d’ailleurs, selon le Réseau français des étudiants pour le développement durable (Refedd), plus logique. « Cela permet, précise Oriane Cébile, la présidente de la structure, d’identifier les problèmes et de trouver des solutions adaptées au contexte. » Aussi, le Refedd a organisé, en 2011, une pesée des déchets alimentaires sur trois sites parisiens, notamment à la Cité universitaire. Résultat : entre 25 et 43 kilogrammes, en moyenne, ont été gaspillés chaque jour durant l’expérience en fonction des lieux, soit, quotidiennement, de 54 à 72 grammes, en moyenne, de denrées par plateau. (...)
Ce qui n’est pas négligeable. L’un des aliments les plus gâchés ? Le pain. Comme à Toulouse, par exemple, où… vingt tonnes partent à la poubelle annuellement sur l’ensemble des points de restauration gérés par le Crous, d’après un audit réalisé fin 2012. Pour comprendre le phénomène, le Crous a sondé un millier d’étudiants fréquentant le RU de l’Université Jean-Jaurès, à Toulouse, en avril 2014. Résultat : plus de la moitié des interrogés ont déclaré laisser du pain sur leur plateau, et 40% de ceux ayant assuré en prendre systématiquement ont dit ne pas le terminer. Pourquoi autant ? « De nombreux sondés n’ont jugé le pain ni bon, ni mauvais, soit juste “mangeable” », glisse Patrick Blondel, le chargé DD au Crous de Midi-Pyrénées. D’où l’idée d’en choisir de meilleure qualité et, surtout, de réduire sa taille à la rentrée qui a suivi, en septembre 2014. « Chaque morceau est passé de 50 à 40 grammes », précise-t-il. À l’École nationale supérieure agronomique de Toulouse (Ensat), certains ont également proposé de couper le pain en deux, l’an dernier, et cela a permis de diviser par trois la quantité jetée. (...)
Autre denrée que les étudiants jettent en masse : l’accompagnement du plat principal. Et, pour y faire face, le self de l’école vétérinaire de Toulouse, servant 600 repas à la journée, a trouvé une solution. Deux buffets chauffants dédiés aux légumes et aux féculents seront installés dans quelques semaines : « Chacun pourra se servir selon son appétit. » Et ça peut marcher, si l’on en croit l’expérience de l’Ecole nationale supérieure agronomique de Toulouse, qui en a installé une, il y a un an, pour ses 300 repas quotidiens : « Rapidement, précise Patrick Blondel, le gaspillage a été diminué de 40% et cela a représenté une économie de 20% d’aliments d’accompagnement. » (...)
« Au niveau individuel, analyse Oriane Cébile, du Refedd, certains étudiants se mobilisent sur le sujet, car il est intimement lié à la précarité. Lorsque l’on vit pour la première fois seul(e) et que les revenus ne sont pas extensibles, il va de soi qu’on ne gaspille pas. Mais de nombreux étudiants pensent ne pas gaspiller, alors qu’il y a encore une marge de manœuvre. » D’où la publication d’un guide traitant de la question : un support qui permet d’apporter quelques recommandations –comment mettre en place une pesée dans son RU par exemple. L’idée ? Inciter à l’action, explique-t-elle : « Les étudiants ont beau savoir globalement que le gaspillage alimentaire est un problème, ils ne voient pas forcément comment y répondre. » Dans son support, le Refedd, qui organise régulièrement des disco-soupes, met en avant des initiatives estudiantines, nombreuses sur les campus. (...)