
Même si Macron a prétendu briser les reins de l’oligarchie en supprimant l’ENA et les grands corps, les hauts fonctionnaires n’ont jamais été aussi choyés : les plus gradés ont profité début 2023 d’une hausse potentielle spectaculaire de près de 25 % de leur rémunération.
Au plus fort du mouvement des « gilets jaunes », lors de son premier quinquennat, Emmanuel Macron a fait mine de rudoyer la haute fonction publique, même s’il en est lui-même issu. Supprimant l’École nationale d’administration (ENA) en même temps que l’accès direct aux grands corps de l’État, il a voulu faire croire qu’il était déterminé à casser le système oligarchique français, objet d’innombrables critiques. (...)
Avec le recul, on se rend compte que le chef de l’État n’a pas franchement mené son projet à bien, sauf en termes de communication. Si l’ENA a effectivement été dissoute, l’école a été recréée sous une autre appellation, celle de l’Institut national du service public. Surtout, Emmanuel Macron a profité de ces annonces pour mettre en œuvre une hausse potentielle des rémunérations de la haute fonction publique, où les plus hautes rémunérations pourront culminer à 256 000 euros brut par an.
Pour le commun des mortels, il est certes très difficile de parvenir à chiffrer avec précision l’impact de la réforme sur les rémunérations des hauts fonctionnaires. Même si officiellement tous les critères de calcul sont désormais publiés au Journal officiel, ce qui n’était pas le cas auparavant pour les emplois les plus élevés.
En naviguant entre tous les critères de calculs, le montant des traitements de base et les primes diverses, le constat ne fait pourtant aucun doute. Pour calmer la colère des hauts fonctionnaires, dont beaucoup ont mal vécu la suppression de l’ENA et surtout de l’accès direct aux grands corps, les voici financièrement choyés comme jamais.
Alignement sur les rémunérations les plus élevées (...)
Concrètement, « un nouveau dispositif de rémunération est mis en place à compter du 1er janvier 2023 » sur la base « d’une grille de rémunération harmonisée », laquelle est « commune au corps des administrateurs de l’État et aux emplois fonctionnels supérieurs (préfets, ambassadeurs, inspecteurs généraux, etc.) ».
Le portail de la fonction publique lève le voile sur la caractéristique majeure de cette réforme en faisant cet ajout : « La rémunération sera plus attractive : un alignement est réalisé à la hauteur des niveaux indiciaires et des plafonds indemnitaires les plus élevés [souligné par nous – ndlr] constatés dans les corps existants ou dans certaines administrations, tout en conditionnant leur accès aux parcours effectivement réalisés et à l’importance de l’engagement professionnel. » (...)
Pour le grade G1, les traitements (donc hors primes) maximaux sont passés d’environ 48 000 euros brut en 2022 à environ 62 000 euros brut annuels en 2023 (il faut enlever environ 20 % pour obtenir le net). Pour des hauts fonctionnaires en début de carrière qui ont été très mal traités ces dernières années, ce ne sont pas des niveaux choquants en valeur absolue, mais il reste que cette catégorie est donc très privilégiée par rapport aux autres fonctionnaires, puisque cela correspond à une hausse moyenne des maximales de 29 %.
Pour le grade G2, atteint le plus souvent au bout de huit années d’activité, les traitements maximums sont passés d’environ 65 000 euros en 2022 à près de 80 000 euros brut annuels à compter du 1er janvier 2023. Ce qui, là encore, correspond à une hausse spectaculaire de 23 %.
Et pour le grade G3, qui regroupe les plus hauts fonctionnaires, la hausse est tout aussi spectaculaire, puisque les traitements maximums sont passés d’une année sur l’autre d’environ 75 000 euros à près de 91 000 euros brut annuels, soit une progression encore une fois de 23 %.
Mais pour connaître les rémunérations de ces hauts fonctionnaires, il faut ajouter les primes à ces traitements. Or les primes portent elles-mêmes sur des montants considérables (...)
Selon de très bonnes sources, la progression des primes qui est survenue en début d’année est proche de la hausse des traitements, soit de l’ordre de 25 %. (...)
ces chiffres spectaculaires sur la progression des rémunérations des hauts fonctionnaires en début d’année soulèvent naturellement d’innombrables questions. La première coule de source. Pourquoi Emmanuel Macron a-t-il décidé un alignement par le haut ? Alors que depuis plus de trois décennies, la politique sociale française est régressive et conduit systématiquement à des alignements par le bas, les hauts fonctionnaires ont bénéficié d’un régime dérogatoire qui retient l’attention.
On devine naturellement la justification dont use le gouvernement : la concurrence du privé est telle que l’État doit engager un effort de rattrapage s’il veut freiner les « pantouflages » de plus en plus massifs des hauts fonctionnaires qui lorgnent les rémunérations à couper le souffle du CAC 40.
Il reste que cette objection ne répond pas à une deuxième interpellation : pourquoi les hauts fonctionnaires sont-ils si bien lotis, et les fonctionnaires du bas de l’échelle si mal ? Comment justifier un tel creusement des inégalités au sein même de la fonction publique ?
À titre d’indication, les deux mêmes rapports donnent des chiffres qui laissent songeur, tellement ils sont faibles : « Le salaire net moyen dans la fonction publique d’État est de 2 639 euros par mois ; viennent ensuite ceux de la fonction publique hospitalière, avec 2 464 euros par mois, et de la fonction publique territoriale, avec 2 019 euros par mois. »
Quel sera l’effet de souffle de cette réforme ? Si la question se pose, c’est que l’on ignore pour l’instant le sort qui sera réservé à certaines grandes institutions, comme le Conseil d’État ou la Cour des comptes. Mais on devine qu’elles vont aussi profiter de cette explosion des rémunérations. Deux décrets, pris en conseil des ministres ce mercredi 21 juin, l’un pour la Cour des comptes, l’autre pour le Conseil d’État, préparent le terrain à cette hausse des rémunérations. (...)
ces chiffres spectaculaires sur la progression des rémunérations des hauts fonctionnaires en début d’année soulèvent naturellement d’innombrables questions. La première coule de source. Pourquoi Emmanuel Macron a-t-il décidé un alignement par le haut ? Alors que depuis plus de trois décennies, la politique sociale française est régressive et conduit systématiquement à des alignements par le bas, les hauts fonctionnaires ont bénéficié d’un régime dérogatoire qui retient l’attention.
On devine naturellement la justification dont use le gouvernement : la concurrence du privé est telle que l’État doit engager un effort de rattrapage s’il veut freiner les « pantouflages » de plus en plus massifs des hauts fonctionnaires qui lorgnent les rémunérations à couper le souffle du CAC 40.
Il reste que cette objection ne répond pas à une deuxième interpellation : pourquoi les hauts fonctionnaires sont-ils si bien lotis, et les fonctionnaires du bas de l’échelle si mal ? Comment justifier un tel creusement des inégalités au sein même de la fonction publique ?
À titre d’indication, les deux mêmes rapports donnent des chiffres qui laissent songeur, tellement ils sont faibles : « Le salaire net moyen dans la fonction publique d’État est de 2 639 euros par mois ; viennent ensuite ceux de la fonction publique hospitalière, avec 2 464 euros par mois, et de la fonction publique territoriale, avec 2 019 euros par mois. »
Quel sera l’effet de souffle de cette réforme ? Si la question se pose, c’est que l’on ignore pour l’instant le sort qui sera réservé à certaines grandes institutions, comme le Conseil d’État ou la Cour des comptes. Mais on devine qu’elles vont aussi profiter de cette explosion des rémunérations. Deux décrets, pris en conseil des ministres ce mercredi 21 juin, l’un pour la Cour des comptes, l’autre pour le Conseil d’État, préparent le terrain à cette hausse des rémunérations.ces chiffres spectaculaires sur la progression des rémunérations des hauts fonctionnaires en début d’année soulèvent naturellement d’innombrables questions. La première coule de source. Pourquoi Emmanuel Macron a-t-il décidé un alignement par le haut ? Alors que depuis plus de trois décennies, la politique sociale française est régressive et conduit systématiquement à des alignements par le bas, les hauts fonctionnaires ont bénéficié d’un régime dérogatoire qui retient l’attention.
On devine naturellement la justification dont use le gouvernement : la concurrence du privé est telle que l’État doit engager un effort de rattrapage s’il veut freiner les « pantouflages » de plus en plus massifs des hauts fonctionnaires qui lorgnent les rémunérations à couper le souffle du CAC 40.
Il reste que cette objection ne répond pas à une deuxième interpellation : pourquoi les hauts fonctionnaires sont-ils si bien lotis, et les fonctionnaires du bas de l’échelle si mal ? Comment justifier un tel creusement des inégalités au sein même de la fonction publique ?
À titre d’indication, les deux mêmes rapports donnent des chiffres qui laissent songeur, tellement ils sont faibles : « Le salaire net moyen dans la fonction publique d’État est de 2 639 euros par mois ; viennent ensuite ceux de la fonction publique hospitalière, avec 2 464 euros par mois, et de la fonction publique territoriale, avec 2 019 euros par mois. »
Quel sera l’effet de souffle de cette réforme ? Si la question se pose, c’est que l’on ignore pour l’instant le sort qui sera réservé à certaines grandes institutions, comme le Conseil d’État ou la Cour des comptes. Mais on devine qu’elles vont aussi profiter de cette explosion des rémunérations. Deux décrets, pris en conseil des ministres ce mercredi 21 juin, l’un pour la Cour des comptes, l’autre pour le Conseil d’État, préparent le terrain à cette hausse des rémunérations. (...)
Enfin, ultime interrogation : quel est au bout du compte le sens de toute cette vaste réorganisation de la haute fonction publique, voulue par Emmanuel Macron ? Au vu de ces chiffres, il n’est pas interdit de penser que l’on a assisté à un formidable tour de bonneteau, où le système oligarchique ressort plus prospère que jamais.