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Les enfants capables de discernement ?
Article mis en ligne le 10 mars 2009

Inventerre/

Un futur projet de loi en préparation va réformer la justice des mineurs sur la base des propositions de la commission Varinard. Il pourrait revoir à la baisse l’âge de la responsabilité pénale.

Sur le sujet, une interview de Boris Cyrulnik , Neuropsychiatre.
Vidéo Marie-Odile Monchicourt - 8 mars 2009 France-Info

Un projet de loi visant à enfermer les enfants dès l’âge de douze ans faut polémique. Vous avez souhaité vous exprimer sur ce sujet, sacahant que la question tourne autour de cette idée d’évaluation du discernement des enfants mineurs.

C’est cela, il y a un projet de loi qui repose sur l’article 122 du Code Pénal qui dit : « Les mineurs capables de discernement sont pénalement responsables des crimes, délits et contraventions dont ils ont été reconnus coupables. »

Le problème, c’est le mot « discernement ». A partir de quel âge est-on capable de discerner, de séparer le bien et le mal, le vrai et le faux ? En Italie et Allemagne, on estime qu’ils discernent à 14 ans. En Angleterre à 10 ans, en Belgique à 18 ans, en Hollande à 12 ans et peut-être en France également à 12 ans.

C’est difficile de répondre à cette question parce que Freud nous a expliqué que les nourissons n’étaient pas capables de discerner. C’est-à-dire qu’ils ne répondaient qu’à leurs besoins et à leurs pulsions, ils n’avaient pas la représentation de la loi, ne discernaient ni le bien ni le mal et n’étaient donc pas pénalisables.

Les nourissons, bon, on comprend !

Alors, je propose de raisonner en termes de développement de l’aptitude à discerner. Les nourissons, on comprend, mais les pervers adultes eux aussi pensent qu’ils ne font pas de mal en passant à l’acte sexuel. Ils ne discernent pas forcément le bien et le mal. Est-ce que ça veut dire qu’il ne faut pas pénaliser les pédophiles et les pères incestueux ?

Donc je pense que, les bébés, les enfants discernent très tôt le bien et le mal, le vrai et le faux, puisqu’on a fait en étologie, dans les théories de l’attachement des expérimentations qui montrent que, dès l’âge de dix mois, les enfants savent distinguer le bien et le mal, la souffrance et la sécurisation. Ca veut dire qu’ils sont très tôt capables de discernement et pourtant on ne va pas mettre en prison un enfant de dix à quinze mois.

Et pourtant cela a failli arriver. Il y a un petit garçon de trois ans qui, à la crèche, a baissé la culotte d’une petite fille de trois ans. La petite fille a protesté, s’est débattue puis est repartie en rigolant. Mais le proviseur lui, a appelé la police ! Donc, il y a des gens qui sont capables de penser qu’on peut pénaliser un enfant de trois ans, alors qu’en fait il aurait suffit de le gronder et de lui expliquer. Ce n’est pas tellement le discernement qui doit mener à la prison ou à la sanction éducative. C’est plutôt le développement de l’empathie, c’est-à-dire de l’aptitude à se représenter les souffrances de l’autre.

Si quelqu’un est capable de transgresser cette loi non verbale : « Je peux tout me permettre, quelque soit le prix que l’autre va payer », à ce moment là, je crois que c’est pénalisable. Donc c’est plutôt l’inaptitude à l’empathie qui est pénalisable parce qu’elle mène à la perversion, alors que l’aptitude au discernement commence extrêmement tôt.

En conclusion, que pensez-vous de la prison pour les enfants mineurs ?

C’est absurde de condamner un enfant, surtout à la prison ! La prison n’a pas de valeur éducative, au contraire, la seule chose qu’elle enseigne, c’est la délinquance, la haine et la solitude.