
Les pratiques de travail social ne concernent pas que la France, l’Europe et plus largement les pays riches. Nous avons aussi à apprendre des pays en voie de développement qui sont confrontés à des crises sévères comme l’insécurité alimentaire, l’exploitation des enfants, l’instabilité politique et économique ou encore le réchauffement climatique qui touche de plein fouet les pays du sud de l’Afrique et de l’Amérique latine.
Je vous propose de découvrir et peut-être aussi de soutenir le travail de professionnels et de bénévoles engagés dans la protection de l’enfance et des personnes vulnérables en République Démocratique du Congo.
Cette carte vous permet de mieux situer le pays et où intervient l’association dans les régions de l’est du pays qui sont frontalières avec le Rwanda, le Burundi et la Tanzanie. C’est aussi une façon de bien mesurer la position et la taille du pays qui est grand comme quatre fois la France. Il est le deuxième plus vaste pays d’Afrique après l’Algérie, et le troisième pays le plus peuplé d’Afrique. Il est aussi le premier pays francophone le plus peuplé avec environ 95,2 millions d’habitants. (...)
Le pays fait face à de nombreux tourments avec une histoire coloniale et politique complexe que je vous invite à découvrir ici
La population vulnérable : les femmes, les enfants, mais aussi les prisonniers
La situation sociale dans le pays est très tendue. Il y a des conflits interethniques importants, des territoires difficilement accessibles et dangereux si on n’est pas Congolais. D’ailleurs, le ministère des affaires étrangères en France indique que le Nord-Kivu et le Sud-Kivu sont « formellement déconseillés » (en rouge sur la carte des niveaux de vigilance) en raison de la présence de différents groupes armés, responsables d’exactions contre les populations civiles. Cela ne veut pas dire pour autant que l’on ne peut pas agir !
C’est pourtant là qu’intervient l’association Uthabiti. (...)
On constate chaque jour la présence de l’association dans des zones instables voire dangereuses pour la population locale. (...)
Aujourd’hui, donnons la parole à Jean Marie Barhakengera Sigareti afin de mieux connaître son engagement et les projets menés et à venir au sein de l’association Uthabiti.
Quelles sont les difficultés auxquelles vous êtes confronté ?
Elles sont multiples, car la situation dans le pays est très difficile. Il existe des milices armées dans le territoire où intervient l’association. Les enfants sont souvent déscolarisés, surtout les filles car la priorité (de l’éducation) est donnée aux garçons, ce qui n’est pas juste. Il y a dans le pays beaucoup d’enfants de rue qui ont besoin d’encadrement éducatif. La pauvreté et le manque de ressources posent aussi de graves difficultés ne serait-ce que pour manger à sa faim. Les femmes seules avec ou sans enfants et les personnes âgées sont aussi un public prioritaire. (...)
Concrètement qui est concerné par les accompagnements sociaux ?
Nous apportons de l’assistance aux différentes communautés dans 4 directions : l’éducation et protection des enfants, la santé mais aussi l’agriculture avec la protection de l’environnement et enfin la paix et droits humains. (...)
L’agriculture est un moteur de la lutte contre la malnutrition. La population est dans une situation très précaire. La précarité pour nous est d’abord alimentaire avec la protection des enfants en détresse, les enfants malnutris, notamment les enfants des rues, ou encore d’enfants vendeurs d’eau contre du manioc. (...)
La paix et les droits humains. Il y a bien sûr le droit à l’éducation, mais il ne peut exister que si les communautés cohabitent dans la paix. Grâce à l’appui de l’association pour l’encadrement des paysans au Congo (AEPCO), Uthabiti a réussi à réunir des communautés et les groupes en conflits pour analyser ensemble les mécanismes possibles pour promouvoir la paix et la cohésion communautaire. Nous avons également organisé des cercles de paix, des jeux de paix pour sensibiliser les communautés à se réconcilier et à cultiver la paix. Il nous faut aussi lutter contre le travail des enfants. (...)
Comment êtes-vous financés ?
Nous sommes une association récente qui est née d’une volonté d’agir face aux conflits interethniques dans les zones où nous intervenons. Nous recevons des financements locaux de particuliers et d’entreprises ainsi qu’une aide au développement via l’ONU. Nous travaillons avec l’autorisation des autorités gouvernementales sur les 3 provinces. Il faut pour cela que nos actions soient « alignées » sur les politiques d’action sociale de l’État, ce qui est le cas. (...)
L’Institut national du travail social (INTS) assure la formation initiale et continue dans le domaine social. Il vise à développer la recherche-action et appliquée en travail social. (...)
Quelles sont vos priorités aujourd’hui ?
Il nous faut agir auprès de plusieurs publics distincts. Une grande priorité concerne la protection de l’enfance et l’insertion des enfants qui vivent dans la rue, mais il y a aussi les personnes qui vivent en milieu carcéral. Beaucoup d’entre elles sont délaissées et l’État ne s’en préoccupe pas suffisamment. Certaines peuvent mourir de faim et de malnutrition. Leur situation est très problématique. Nous devons aussi soutenir les personnes du 3ᵉ âge. Elles sont sans protection sociale et seules leurs familles peuvent éventuellement les aider. Mais avec les conflits, il y a aussi une nécessité de protéger dans des foyers les femmes veuves qui sont âgées et sans aucun moyen de subsistance. Enfin, il y a tout le travail à engager auprès des communautés. Il y a dans notre pays environ 450 tribus qui utilisent quasiment toutes un dialecte différent. Il faut les aider à cohabiter dans la paix.
Certains conflits sont des conflits tribaux avec des communautés qui veulent accaparer les terres d’une autre. (...)
Et vos besoins ?
Bien sûr, nous avons besoin de soutien, cela passe par les dons, mais aussi des appuis nous permettant de mieux assurer notre mission auprès de la population. Toutes les initiatives sont bonnes quand elles vont dans ce sens. (...)