
Les Français consomment quatre fois plus de miel que n’en produit le pays. Mais cet aliment est souvent l’objet de fraudes qui le dénaturent, notamment par ajout de sucre. Les miels importés d’Asie sont le plus souvent en cause.
Sa couleur de soleil aux reflets d’or souligne sa valeur, sa transparence est symbole de pureté. Sucré et subtilement parfumé, nourrissant et antiseptique, il fait figure d’aliment miracle. Quoi de plus beau et bon que le miel, franchement ?
Pourtant, il arrive qu’il ne soit pas si immaculé qu’il y paraît.
D’après une série de tests menés par l’Union européenne, et dont les résultats préliminaires ont été livrés en décembre 2015, 32 % des miels analysés présentaient une non-conformité soupçonnée ou avérée. En particulier, 6 % avaient été dilués avec du sirop de sucre, et 11 % avaient possiblement subi le même traitement. Pourtant, dans l’Union européenne, pas d’ambiguïté, le miel désigne un produit issu de la ruche, sans aucun ajout ou retrait de quoi que ce soit. Tout ajout de sirop de sucre est donc bien une fraude.
Les tests européens viennent confirmer des analyses réalisées en France par le magazine Que Choisir en septembre 2014 : sur 20 miels « premier prix » achetés dans diverses enseignes de la grande distribution, six présentaient des ajouts de sucre. Soit presque un tiers des produits. Fin 2013, la DGCCRF (la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes), constatait de son côté après enquête que plus d’un miel sur dix avait « subi l’addition de sucres exogènes issus de la canne ou du maïs (jusqu’à une teneur de 44 %), ou d’eau ». (...)
ce « faux » miel, ou miel adultéré, vient principalement de Chine. « À première vue, seul un maximum de 15 % du miel chinois correspond à notre définition du miel, estime Étienne Bruneau, responsable de la commission qualité au sein d’Apimondia, la fédération des syndicats d’apiculteurs dans le monde. On sait que les miels à moins de 1,30 euro, 1,50 euro le kilo, ne passeront pas aux analyses. Si on veut des miels qui “passent” les tests les plus récents, il faut le payer au moins 2,35 euros le kilo. Et là on peut avoir du vrai miel, produit en Europe. »
La Chine est le principal exportateur de miel dans le monde, et elle propose les prix les plus bas. (...)
« Les importateurs savent très bien qu’il s’agit de faux miel »
Les miels de différents pays sont ensuite mélangés par les importateurs pour assurer un goût et une couleur stable au produit, conditionnés, puis vendus à la grande distribution. Le plus souvent, ce sont les miels bas de gamme des marques distributeurs. Sur l’étiquette, aucune indication florale à part « toutes fleurs » ni d’origine géographique. La mention la plus courante est « mélange de miels originaires de l’UE et hors UE »… Difficile de faire moins précis. (...)
il est facile pour un importateur de faire venir du faux miel sans qu’il soit détecté. (...) dans un certain nombre de cas, le consommateur est abusé. Mais surtout, le faux miel déstabilise le marché et nuit aux producteurs de vrai miel, les apiculteurs. (...)
ce que demandent les représentants des apiculteurs : une traçabilité totale de l’origine des miels mélangés dans notre pot, avec une indication sur l’étiquette, ou via un code QR qu’il suffirait de scanner avec un smartphone. « Aujourd’hui, même quand on achète du miel en Ukraine ou en Espagne, on ne peut pas savoir s’il a d’abord été importé de Chine », précise Étienne Bruneau. La proposition a été faite à la Commission européenne, « mais le sujet a été reporté. La Commission est en général opposée à toute démarche administrative supplémentaire », regrette le spécialiste. Pour les gourmands, la seule solution reste donc pour l’instant de se méfier des miels aux étiquettes imprécises. (...)