Dans les entreprises, de nombreuses enquêtes font état d’une hausse constante de la fréquence et de l’intensité des facteurs de stress. Certaines méthodes de management utilisées aujourd’hui provoquent des risques psychosociaux en augmentation, qui nuisent à la fois à la santé des travailleurs et à l’efficacité de l’entreprise. Le contexte entrepreneurial est de plus en plus concurrentiel, avec des critères de rentabilité de plus en plus exigeants, et, pour respecter les contraintes économiques et financières, les systèmes organisationnels se complexifient, demandent une grande réactivité et peuvent aisément devenir pathogènes et conduire à du harcèlement moral avec des abus d’autorité totalement irrespectueux de la personne. Mais le harcèlement moral (mobbing) peut être provoqué aussi par des comportements individuels pervers de responsables hiérarchiques ou de collègues...
Dans la pratique, savoir distinguer ce qui relève d’une pratique managériale excessive du harcèlement moral est parfois malaisé.
Certaines formes d’organisations du travail provoquent par elles-mêmes le harcèlement et la violence au travail (management par la punition, la peur...). Toutefois, le stress du harcèlement moral individuel se distingue de celui lié aux mauvaises conditions de travail générales, car celles-ci concernent tous les salariés ; il se distingue aussi des avertissements ponctuels verbaux ou écrits à un salarié dans l’exercice normal de l’autorité hiérarchique, qui sont argumentés, qui portent sur des faits liés à l’exécution du travail et peuvent être discutés, réfutés par manque de preuve ou de pertinence.... Or, le harcèlement moral est ici le fait d’un supérieur hiérarchique (ou, rarement d’un collègue) ayant une personnalité obsessionnelle ou perverse dans un but gratuit de destruction d’autrui et de valorisation de son propre pouvoir, et ces agissements ne visent pas à l’amélioration objective du travail. Mais il peut s’agir aussi de manœuvres conscientes d’intimidation pour obtenir la démission volontaire et contourner ainsi les règles du licenciement, et on se rapproche alors du harcèlement managérial.
Le harcèlement moral consiste à isoler le salarié, à le persécuter par la surveillance obsessionnelle de tous ses faits et gestes, à déqualifier sans raison son poste, à le surcharger ou au contraire à le sous-charger abusivement, à lui adresser constamment des reproches de type punitif visant sa personnalité, à exiger sans cesse des justifications, à afficher du mépris et à l’humilier publiquement ...
Il convient d’être attentif à tout indicateur qui pourrait révéler une situation de harcèlement : des conflits personnels répétés, la récurrence de plaintes de la part des salariés ou encore l’éclosion de violences physiques au sein de l’entreprise.
Certaines enquêtes mesurent jusqu’à 30% le nombre de salariés estimant avoir été harcelés au travail : cette fréquence impressionnante doit être nuancée compte tenu que le terme est flou et qu’il est difficile de cerner ce qui est la réalité des cas. Il n’y a pas de pathologie psychologique spécifique due au harcèlement puisqu’il s’agit d’un éprouvé subjectif, et des troubles paranoïaques (sentiments de persécution imaginaires) ou des menées manipulatrices à l’encontre d’un chef de manière à lui porter préjudice, peuvent invalider l’accusation de la personne se prétendant harcelée.
Toutefois, même en tenant compte de ces remarques, le phénomène semble très répandu, et on observe une multiplication des poursuites pénales au motif de harcèlement moral, qui posent souvent des problèmes complexes d’imputabilité et de réalité des plaintes avec pour conséquence l’aboutissement de peu de procédures (...)
Caractéristiques du harcèlement moral au travail
Le harcèlement moral au travail a de tout temps existé, mais il n’est plus toléré, et la loi de modernisation sociale de 2002 a introduit la notion dans le code du travail à l’article L1152-1 (ancien article L122-49) qui définit le harcèlement moral et sert de base aux poursuites civiles ou pénales : le harcèlement moral est un « ensemble d’agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits du salarié et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».
Il faut que les agissements à caractère abusif soient répétés, insistants, et concerne une personne en particulier, car tous les comportements agressifs, tous les conflits, toutes les pressions ne relèvent pas du harcèlement moral (...)
La réglementation du harcèlement moral au travail
Le harcèlement moral est considéré comme un délit réprimé par le Code du Travail et leurs auteurs s’exposent à des sanctions nécessairement associées à une faute grave (mutation, suspension temporaire, voire licenciement).
"Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel." (...)