
Jusqu’au 2 mai, une consultation publique ouverte à tous, citoyens et agriculteurs, doit préparer la réforme de la politique agricole commune (PAC), prévue en 2020. Née en 1962, la PAC est un des piliers de la construction européenne. Décriée, elle est également méconnue. Reporterre vous aide à y voir plus clair, pour que vous puissiez donner votre avis.
La PAC, ou politique agricole commune. Cet acronyme bien connu des agriculteurs l’est moins du citoyen lambda. Pourtant, elle est au cœur du fonctionnement de notre agriculture et son influence sur la qualité de ce que nous mangeons et sur le type d’agriculture. Fait rare, la Commission européenne a demandé aux Européens leur avis à son sujet (...)
Preuve que le sujet est sensible politiquement, la FNSEA (la Fédération nationale des exploitants agricoles) a lancé en mars une campagne de réponse à la consultation. Selon le site d’information Euractiv, le syndicat agricole français majoritaire aurait diffusé à ses antennes locales un guide appelant son réseau à inonder la Commission et à ainsi submerger les réponses de la société civile afin que la prochaine PAC ne contrevienne pas aux intérêts de certains agriculteurs.
Alors, pourquoi la PAC inquiète-t-elle autant les syndicats agricoles ? Et qu’est-ce que c’est, au fait ? Avant de participer à la consultation, Reporterre vous propose un rappel.
Pourquoi l’Europe a-t-elle mis en place une politique agricole commune ? (...)
Quelles sont les critiques faites à la PAC ?
Elle ne garantit plus les revenus des agriculteurs.
Le nombre d’agriculteurs qui jettent l’éponge explose. Les drames humains sont fréquents : les agriculteurs représentant la catégorie professionnelle avec le plus fort taux de suicides. La sécurité sociale des agriculteurs, la MSA, montre qu’en 2016 plus de la moitié des agriculteurs disposent d’un revenu annuel imposable inférieur à 4.248 euros, subventions européennes comprises, soit moins de 354 euros par mois. Un rapport d’avril 2016 de l’eurodéputé Eric Andrieu montre que la PAC n’a pas créé d’emplois, les ayant, au mieux, maintenus.
Elle est inégalitaire.
Les aides individuelles sont indexées au nombre d’hectares de l’exploitant et aux aides attribuées les années précédentes. Ainsi, 10 % des exploitants agricoles touchent 40 % des aides, selon un rapport d’information du Sénat de mars 2017. Les premiers bénéficiaires des aides en France sont les céréaliers (blé, maïs, etc.) et les éleveurs bovins. La Confédération paysanne ou les ONG environnementales critiquent la déconnexion entre les aides et les secteurs en difficulté. Ces inégalités de répartition des aides encourageraient, selon eux, l’agriculture productiviste au détriment d’une agriculture paysanne, respectueuse de l’environnement et assurant un revenu digne aux agriculteurs.
Beaucoup de son budget est coincé dans les méandres administratifs.
Un système complexe et inefficace, voilà une critique courante qui semble faire consensus parmi les professionnels de l’agriculture, mais pour des raisons différentes.
La multiplicité des aides forme un labyrinthe et leur versement a tendance à se faire attendre.
Ainsi, certains appellent de leurs vœux un nouveau modèle de financement de la PAC avec une enveloppe essentiellement axée sur le deuxième pilier, celui sur le développement rural. D’autres, comme l’eurodéputé José Bové, considèrent que la réforme de 2013 dessine une PAC à la carte, bien loin d’une politique agricole « commune ».
Elle déséquilibre le marché.
Certains pays européens, comme les Pays-Bas, prônent une politique qui libèrerait le marché de ses « entraves » afin que les agriculteurs en tirent leurs revenus et ne dépendent plus des aides européennes. Cette politique pourrait laisser les paysans sans soutien européen, l’agriculture redevenant un produit comme un autre.