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France TV Info
La garde à vue de Norman Thavaud pour viols et corruption de mineurs a été levée, sans poursuites à ce stade
#viols #BalanceTonYoutubeur
Article mis en ligne le 7 décembre 2022
dernière modification le 6 décembre 2022

L’enquête, ouverte en janvier, a été confiée à la brigade de protection des mineurs. La procédure compte à ce jour six plaignantes.

La garde à vue du Youtubeur Norman Thavaud pour viol et corruption de mineur a été levée, mardi 6 décembre, au soir "pour poursuite d’enquête", sans poursuites à ce stade, a fait savoir le parquet de Paris. L’animateur de la chaîne "Norman fait des vidéos" aux douze millions d’abonnés avait été placé en garde à vue lundi dans le cadre d’une enquête préliminaire confiée à la Brigade de protection des mineurs (BPM), ouverte en janvier 2022. Six jeunes femmes ont porté plainte contre lui. 

Norman Thavaud, l’un des youtubeurs les plus suivis de France, avait été visé par des accusations, dès 2018, lorsque Squeezie, autre vedette de la plateforme, avait écrit des messages sur Twitter avec le hashtag #BalanceTonYoutubeur. A l’époque, les différents témoignages n’avaient pas encore pu être vérifiés et des faux documents étaient partagés. 

L’enquête concerne six plaignantes, précise le parquet de Paris à franceinfo. Selon nos informations, cinq étaient mineures au moment des faits. (...)

Webedia, qui a racheté la chaîne YouTube de Norman en 2015 a réagi lundi après-midi, annonçant la "mise en suspens de sa collaboration avec le youtubeur".

Lire aussi sur Numerama :

Norman, Léo Grasset, ExperimentBoy : pourquoi YouTube ne sanctionne-t-il pas les youtubeurs ?

Plusieurs youtubeurs français connus ont été accusés de faits allant du harcèlement sexuel au viol, en passant par la corruption de mineurs. YouTube dispose d’outils pour réagir. La plateforme, tiraillée entre plusieurs injonctions contradictoires, brandit des règles universelles pour justifier ses décisions au cas par cas. Pour l’instant, elle n’a pénalisé aucun des vidéastes mis en cause depuis 2020 pour des faits présumés en dehors de sa plateforme.

La nouvelle s’est répandue comme une trainée de poudre dans l’univers du YouTube français : Norman Thavaud, le célèbre vidéaste, a été placé en garde à vue pour des accusations de viol et de corruption de mineurs le 5 décembre 2022. La garde à vue a été prolongée le lendemain. La procédure fait mention de « six plaignantes » et d’une enquête ouverte en janvier, soit onze mois plus tôt.

Sur YouTube, Norman est probablement l’une des plus grandes références en France, avec ses 11,9 millions d’abonnés et sa chaîne active depuis douze ans. La plateforme vidéo qui appartient à Google est indissociable de l’activité de l’humoriste, qui s’est fait connaitre grâce à elle, et dont il tire une partie de ses revenus depuis une décennie.

Interrogée par Médiapart, YouTube France aurait expliqué ne pas exclure de « prendre des mesures » dans le cas où « le comportement d’un créateur, sur YouTube ou en dehors, nuit à [leurs] utilisateurs, à [leur] communauté, à [leurs] employés ou à [leur] écosystème ». Néanmoins, cette réponse fait partie des réactions habituelles de la plateforme : elle ne cible pas de vidéaste en particulier et ne garantit aucune action concrète. De facto, YouTube n’est, en effet, jamais contraint d’expliquer publiquement une de ses décisions. (...)

La plateforme dispose d’une page spécifique officielle qui définit ce qu’elle appelle la responsabilité des créateurs, qui fait mention du comportement des vidéastes hors de son site. C’est cette page qui, pour le cas de Norman Thavaud, nous intéresse. Elle résume bien les cas dans lesquels YouTube peut se saisir : « Certains comportements sur la plate-forme et ailleurs peuvent également être considérés comme inappropriés et entraîner des sanctions ». Parmi les exemples, on trouve la « participation à des actes abusifs, violents ou cruels ».

Ces règles ne sont pas spécifiques à la France ; il existe même une vidéo en anglais publiée en 2021 par YouTube qui en résume les grandes lignes. (...)

Quand YouTube décide-t-il d’agir ?

La grande question est de savoir à quel moment la plateforme décide d’ouvrir une enquête interne pour décider s’il y a des raisons d’agir — tout en ne se « substituant pas à la justice », comme le rappelle souvent YouTube.

Le cas de Norman Thavaud est similaire à d’autres youtubeurs qui ont été accusés, ces dernières années, de faits de harcèlement, agressions ou corruption de mineurs. En 2020, Numerama publiait une grande enquête, à l’époque inédite dans le paysage YouTube français, révélant les accusations d’une dizaine de fans du youtubeur Baptiste Mortier-Dumont, alias ExperimentBoy, qu’il aurait ciblés entre 2013 et 2019. Plusieurs plaintes pour corruption de mineurs ont été déposées à son encontre. Malgré nos révélations, la plateforme n’avait pas sanctionné la chaîne à plus d’un million d’abonnés. (...)

Plus récemment, c’est le youtubeur Léo Grasset de la chaîne DirtyBiology qui a été mis en cause par plusieurs femmes, avant qu’une femme ne porte plainte pour viol fin novembre 2022. À ce jour, YouTube n’a pas pris de décision concernant la chaîne à 1,2 million d’abonnés.

En 2020, alors que Numerama préparait une enquête sur le sujet, YouTube avait en revanche décidé de supprimer la chaîne du polémiste Dieudonné, accusé de publier des contenus qui incitent à la haine. Contrairement aux agissements supposés de Norman, Léo Grasset ou Baptiste Mortier-Dumont, la réponse de YouTube aux contenus de Dieudonné s’est faite en réaction de publications hébergées directement sur la plateforme — ce qui permettait probablement plus facilement à la firme de justifier sa décision.

Pour le cas des trois autres youtubeurs, il s’agit de comportements présumés qui auraient eu lieu en dehors du service de vidéo en ligne. À ce jour, aucun d’entre eux n’a vu ses vidéos démonétisées ou son activité sur la plateforme perturbée. ExperimentBoy ne publie plus de vidéos sur YouTube depuis nos révélations. Léo Grasset a quant à lui cessé de diffuser des vidéos pendant 5 mois, avant de recommencer à en publier fin novembre 2022 — une en « réponse à Médiapart », puis une seconde, plus classique, sur l’intelligence artificielle. La dernière vidéo de Norman, elle, date d’il y a onze jours, avant sa garde à vue.

Une ultime question se pose : si YouTube venait à prendre des sanctions à l’égard de Norman, comment la plateforme pourrait-elle justifier ne pas en faire de même pour les autres youtubeurs mis en cause — d’autant plus si elle ne calque pas forcément ses décisions sur les temporalités judiciaires ? Au vu du nombre d’affaires qui éclatent aujourd’hui dans l’univers du YouTube français, le service de Google risque pourtant d’être de plus en plus contraint de faire des choix, pour « protéger ses utilisateurs et sa communauté », comme ses règles d’utilisation l’indiquent.