...Les banlieues ne manquent pas d’attentions. Ni des médias, ni des politiques. Pourtant, une situation inédite perdure. Une trentaine d’îlots enclavés du territoire français survivent en marge. Coupés du pays. À chaque soubresaut, on se lamente sur le manque d’ambitions, la désertion de l’état, les trafics en tous genres et la violence. Après le gros temps, les enquêtes sociojournalistiques vont en pèlerinage pour y découvrir les contrées vierges de civilisation et de progrès. Arte s’y est essayé récemment. Une émission sur le sexisme en banlieue avec en toile de fond le calvaire de Sohane. Un programme d’autant plus retentissant qu’il fut annulé pour cause de menaces. Plus que l’information par le documentaire, c’est la révélation des pratiques (en l’occurrence des pressions) dans ces territoires sauvages qui éclairent crûment le sujet. Le propos n’est pas de minimiser le machisme et la violence brute qui y sévissent, ces phénomènes sont une réalité effrayante. La question est plutôt de savoir pourquoi et comment les politiques ainsi que les médias, benoîtement, découvrent le pays, leur pays, à intervalles réguliers...
...La banlieue est un monde à part hors de toutes limites de la République. Des zones de non-droits comme le relève L. Bronner dans son hallucinante plongée dans les ghettos français. Par non-droits il n’évoque pas seulement ce que les pragmatiques s’entêtent à restituer sur les plateaux TV, c’est-à-dire la sécurité caparaçonnée et lourdement armée. Il parle aussi et surtout des droits simples de tous les citoyens du territoire : l’accès à de vulgaires services publics en état de fonctionner, des transports réguliers, des zones d’activité pour travailler, en d’autres termes une vie sociale normale. Partie intégrante du territoire national donc soumis aux mêmes règles il semble que tous, au-delà des discours et des mines concernées, se satisfont de ce bannissement. De cet apartheid économique. ...