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Sud-Ouest
L’horreur financière
Jean-Claude Guillebaud
Article mis en ligne le 12 mai 2013

J’emprunte ce titre à ma regrettée consœur, l’écrivaine Viviane Forrester, disparue le 30 avril dernier. Elle avait publié en 1996 un magnifique texte protestataire, « L’Horreur économique ». Le livre fit grand bruit. Avec le recul, c’est peu de dire que ce cri de rage était prémonitoire. À un détail près : depuis, les délires de la finance ont largement supplanté ceux de l’économie traditionnelle.

Dans ces colonnes, j’ai maintes fois exprimé la colère que nous inspire aujourd’hui la mise en coupe réglée de nos démocraties - peuples et gouvernants confondus - par les folles logiques de la cupidité financière. Périodiquement, l’actualité nous offre de nouveaux exemples de cette déraison. Voilà le dernier en date. Mardi 7 mai, la Société générale (154 000 salariés dans le monde) a rendu publique sa décision d’envisager la suppression d’un millier d’emplois, au prétexte que les profits prévus pour 2013 n’étaient « que » de 364 millions d’euros.

Le communiqué officiel de ladite banque censé justifier cette décision évoquait trois objectifs : « Réduire les coûts et renforcer la compétitivité, simplifier le fonctionnement du groupe et renforcer les synergies ». Or, chose incroyable, les termes de ce communiqué passe-partout coïncident, à la virgule près, avec ceux que le cinéaste Costa-Gavras prête au sinistre patron de la banque (fictive) Phénix dans son film ravageur, « Le Capital », sorti en novembre 2012.

Ce film glaçant, horrifiant même, est une charge contre l’absolu cynisme et la cupidité sans limites qui gouvernent les grands groupes financiers, qu’ils soient américains, britanniques ou français. (...)

À Bercy, les jeunes fonctionnaires du ministère des Finances constituent une « élite de l’élite ». Ils projettent presque tous de « pantoufler » le plus vite possible dans le privé pour y faire fortune. Or, le « privé » en question, c’est le secteur bancaire. Il leur est donc interdit de déplaire à leurs futurs patrons. Voilà pourquoi le monde de la finance « tient » les hauts fonctionnaires du Trésor, lesquels tiennent la dragée haute à leur propre ministre.

Aux citoyens que nous sommes, il reste les yeux pour pleurer…