L’effondrement est dans l’air du temps sauf que ce dernier s’éternise. Les voisins qui sont au chômage l’expriment ainsi à leur manière : “Nous faisons tout pour préserver notre dignité. Nous arrivons toutefois à une situation limite. Nos enfants trouvent parfois que le réfrigérateur est bien vide... et c’est insupportable. Pour le reste, nous n’avons plus peur de rien. Nous devons dix mille euros aux impôts et autant à la Sécurité Sociale depuis deux ans, après la faillite de notre petit commerce. Nous regardons à la télévision des reportages tous les soirs sur ces foyers, ces familles privées d’électricité parce qu’elles n’arrivent plus à payer”. Effectivement. Ces foyers se comptent désormais par dizaines de milliers en Grèce.
La zone euro... c’est l’Europe sans l’électricité !
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Telle une chômeuse en Crète et qui élève seule ses enfants dont un souffre d’un handicap. Jusqu’au début de cette semaine elle survivait grâce à la solidarité de terrain et de notre dernier humanisme restant ; désormais, elle est mise en état d’arrestation pour une vieille contravention datant du temps où elle se déplaçait encore en voiture à Athènes. D’après le reportage du jour (Real-FM), les policiers de la ville de la Canée seraient autant accablés que tout le monde de cette affaire. (...)
Nous assistons à notre mort en direct mais étant fort bien informés de tout... dans une époque ainsi formidable. Encore une fois les masques tombent comme jamais depuis la fin de la dictature des Colonels, ou de celle de Francisco Franco. On... savoure alors comme on peut notre si “Belle Époque” du siècle d’après.
Sauf ceux qui ne savoureront plus grand-chose et qui nous regardent sans nous voir, comme dans un service des Soins Intensifs d’un hôpital athénien. Les médecins reçoivent les proches de ceux qui sont déjà bien loin au-delà de la dignité et de l’adversité. Et le lent génocide économique imposé à nous tous par la Troïka (UE, FMI, BCE) a déjà fait disparaître plus de 1.200 lits pour soins intensifs en Grèce, et à Athènes, plus de deux cent chambres ainsi spécialisées restent inutilisées par manque de personnel (reportage Real-FM du 26 novembre).
Et pas plus tard qu’avant-hier, le ministre de la santé a annoncé la mise “au régime de disponibilité” d’un grand nombre de médecins et d’infirmiers, commençant par ceux des hôpitaux psychiatriques. En signe de protestation, ces derniers ont symboliquement muré l’entrée de leur hôpital à Dafni près du Pirée. (...)
Nous savons d’ailleurs que la “libéralisation” des saisies pour dettes frappant même les résidences principales exigée et obtenue par la Troïka et qui entera en vigueur au 1er janvier 2014, vise à faire transmettre aux banques la propriété d’un grand nombre de biens immobiliers. C’est ainsi qu’elles pourront alors incorporer ces actifs dans leurs bilans, avant de les vendre aux fonds vautours internationaux qui alors se trouvent déjà en Grèce et spéculent sur nous pendant que nous mourons avec, ou sans soins intensifs.
Pour une bonne partie de notre presse et pour 90% des Grecs, Antonis Samaras, Yannis Stournaras, Evangelos Venizélos (et autant les autres politiciens de la dite Europe actuelle) sont les serviteurs de ce système mafieux international érigé en régime politique absolu du XXIe siècle.
Étrange époque. Alors privés des nos hôpitaux psychiatriques nous serions pourtant guéris des mensonges de jadis. Impossible de dire pourtant et pour l’instant quel sera l’impact de cette prise de conscience brutale et assez généralisée. (...)