« Il y a de grandes chances pour que le système alimentaire européen s’effondre d’ici quelques années ». Tel est le constat d’un rapport qui sonne l’alarme, et propose des pistes pour une transition vers un modèle alimentaire post-industriel, aux mécanismes résilients et durables.
La convergence de toutes les crises (économie, social, climat, biodiversité, énergie, etc.) menace la stabilité du système alimentaire industriel européen. Tel est le constat d’un rapport commandé par le député européen Yves Cochet pour le groupe les Verts/ALE, et intitulé Nourrir l’Europe en temps de crise. Vers des systèmes alimentaires résilients. Au delà du constat accablant, le rapport dresse un panorama original d’une alimentation post-industrielle européenne, et les grandes lignes d’une transition qui pourrait s’avérer rapide et brutale.
Loin de la PAC, des monocultures et des exportations subventionnées, cet avenir aurait plutôt les couleurs de l’agriculture urbaine, l’agroécologie et la permaculture. Un grand bond en avant vers des petits systèmes résilients et autonomes.
Malgré la crise économique et sociale, l’Europe reste un continent stable, riche et puissant ; sa population y est relativement bien nourrie. Mais pour combien de temps encore ? (...)
Ce système alimentaire industriel contribue très largement à un ensemble de crises que subit notre planète et nos sociétés : le réchauffement climatique, la dégradation des écosystèmes et de la biodiversité, l’épuisement des énergies fossiles, la situation sociale des agriculteurs, la mauvaise santé des populations, et un gaspillage immense de nourriture.
L’ironie est que ces crises l’affectent en retour de manière inquiétante. Les menaces qui pèsent sur ce système sont un climat et une économie de plus en plus instables, et surtout un épuisement des énergies fossiles, des minerais et de l’eau douce. Une autre menace vient de sa structure même, centralisée et interconnectée, très vulnérable aux chocs systémiques.
Toutes ces menaces interagissent, et pourraient provoquer un effet domino. (...)
La production devrait désormais être cadrée par deux principes fondamentaux : restaurer les écosystèmes et se limiter uniquement aux énergies renouvelables. On parlera donc d’« agriculture de réparation », et d’« agriculture solaire ».
Enfin, pour qu’un système alimentaire résilient se maintienne malgré ces crises, il est nécessaire que les consommateurs prennent conscience de ses mécanismes et de ses limites. Sans cela, toute transition est impossible. (...)
Nous ne partons pas de rien, les graines du nouveau système alimentaire ont déjà été plantées. Le cadre de transition esquissé dans cette étude s’incarne déjà sur le terrain. De multiples expériences alternatives, souvent à la marge mais économiquement viables, émergent partout, là où la sécurité alimentaire vacille, et où des citoyens conscients des menaces décident d’agir collectivement. (...)
Sur le terrain, une transition a déjà démarré silencieusement depuis des années. Beaucoup d’agriculteurs ont déjà réduit leur consommation d’énergie, d’engrais et de pesticides. Le nombre de fermes biologiques et agroécologiques, de marchés de producteurs locaux et de circuits courts type AMAP est en constante augmentation. Des consommateurs de plus en plus nombreux sont conscients de l’impact de leur nourriture sur l’environnement et privilégient les systèmes locaux.
Mais si la transition a démarré aux marges du système, il faudra passer à la vitesse supérieure en commençant dès à présent une transition programmée, à une plus grande échelle et de manière bien plus officielle. Car le temps presse. (...)