Suscitant de nombreux fantasmes, l’Aide médicale d’État (AME) permet à des étrangers en situation irrégulière en France d’avoir accès à un panier de soins pris en charge par la sécurité sociale. Mais contrairement aux rumeurs, l’État ne paie pas l’intégralité des frais de soins, mais une partie seulement. De quels soins s’agit-il ? Qui paie ? InfoMigrants fait le point.
L’AME en quelques mots
L’Aide médicale d’État (AME) permet aujourd’hui aux étrangers vivant en France en situation irrégulière et précaire de bénéficier d’un accès à un "panier de soins" gratuitement sans avancer de frais.
Sa mise en place bénéficie à tous : les migrants qui arrivent illégalement en France ont souvent un état de santé fragile. L’existence de l’AME leur permet de se soigner mais aussi de protéger l’ensemble de la population en limitant les risques de propagation de maladies.
L’Aide médicale d’État existe depuis la 3e République. "Elle fut créé en 1893 avant la sécurité sociale", explique Didier maille, coordinateur du pôle social du Comede (Comité pour la santé des exilé.e.s) à Paris. Elle s’appelait alors ’Assistance médicale gratuite’. Pendant des années, elle a concerné les sans-papiers mais aussi les Français sans emploi, les personnes les plus pauvres de la population. Tous pouvaient bénéficier d’un accès gratuit aux soins".
Ce n’est qu’en 1999, lors de la réforme CMU, que l’AME s’est trouvée réduite aux seuls étrangers en séjour irrégulier. Tous les autres bénéficiaires (en 1999, plus de 4 millions de français et étrangers en règle) ont été transférés de l’Aide médicale vers l’assurance maladie plus protectrice. "Seuls sont restés les sans-papiers. Cela a donc créé un effet loupe sur l’AME", explique Didier Maille.
À quels soins ont droit les bénéficiaires de l’AME ? (...)
depuis les années 2000, les bénéficiaires de l’AME ne peuvent plus profiter "des cures thermales, de frais d’hébergement enfants et adolescents handicapés, des examens bucco-dentaires pour les enfants, des parcours de procréation médicalement assistée (PMA)". Ces soins restent intégralement à la charge du patient.
Hormis cette liste, le bénéficiaire de l’AME peut accéder à tous les autres soins (médecine générale, dentiste, ophtalmologue...), comme n’importe quel assuré social.
Les soins compris "dans le panier AME" sont pris en charge à 100 %.
Pourquoi est-il faux d’affirmer que les migrants sont mieux lotis que les Français les plus pauvres ?
Prendre en charge le soin à 100 % ne signifie pas le rembourser à 100 %. C’est en cela que l’AME peut susciter certains fantasmes.
L’AME applique 100 % du tarif de la sécurité sociale. "C’est très différent", insiste Didier Maille. (...)
"Les gens font souvent la confusion. L’AME ne paie pas 100 % de la dépense, elle paie 100 % du tarif de la sécurité sociale". (...)
Les sans-papiers bénéficiant de l’AME n’ont pas de complémentaire santé, pas de mutuelle. "Les sans-papiers ne sont donc pas mieux traités que les Français modestes".
Le niveau de prise en charge de l’AME se révèle insuffisant pour couvrir les frais réels d’une prothèse ou d’une paire de lunette. (...)
Si un bénéficiaire de l’AME se rend chez un médecin généraliste, il n’avance pas de frais ?
"Si un sans papier trouve un médecin qui applique le tarif de la sécurité sociale, soit une consultation à 25 euros, l’AME prendra en charge les 25 euros – ce qui équivaut au tarif 100 % de la sécurité sociale.
Il n’y a pas de ticket modérateur", explique Didier Maille. Cela signifie que le sans-papiers n’a pas d’argent à avancer.
Mais attention : encore faut-il que le bénéficiaire de l’AME trouve un médecin qui applique le tarif de la sécurité sociale, sans dépassement d’honoraire. Auquel cas, le reste à payer est à la charge du bénéficiaire de l’AME. (...)
Le bénéficiaire de l’AME est un assuré social comme un autre ?
Non. Les bénéficiaires de l’AME ne sont pas des "assurés sociaux" mais des "bénéficiaires d’une aide sociale d’État", ils ne peuvent pas accéder :
– À une carte vitale
– À un numéro de sécurité sociale
– À l’examen de santé périodique gratuit de la Sécurité sociale
L’AME est accordée pour une durée d’un an, le renouvellement n’est pas automatique. (...)