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Greek crisis
Figues et raisins
Article mis en ligne le 8 août 2013

En cette saison, les figues apparaissent enfin sur les étalages des primeurs ou sur les charrettes des marchands ambulants. Sur les étals du marché central, le poisson est abondant sauf que nous préférons attendre plutôt la dernière heure, c’est-à-dire vers 15h, pour en acheter à moitié-prix. L’été pour une fois demeure entier, Athènes se vide peu à peu mais plus complètement, tandis que sur le Lycabette, les nombreux touristes s’avouent toujours si émerveillés du panorama qu’offre sur Athènes, cette colline, point culminant de notre ville.

(...) Notre ville se vide peu à peu mais pas complètement comme les autres années jusqu’à mi-août, comme de saison. Costas par exemple, le voisin dentiste ne partira pas comme avant à Naxos, “le coût du voyage c’est à dire du ferry est désormais exorbitant. Nous sommes partis durant quatre jours en juillet, invités au bord de la mer du côté de Corinthe chez un confrère et ami, c’est tout pour cette année. Je remarque aussi que les gens ne sont pas autant partis que les autres années. Mes patients ne disent pas autre chose en ce moment. Les immeubles vides en août, cela, ne se verra plus ou plus jamais. Si nous y prêtons bien attention, les gens restent plutôt cloitrés chez eux, souvent ils boivent une bière au balcon, ils ne sortent même pas, ils n’ont plus les moyens ou alors ils dépriment”. Costas voit juste.

Christos, l’autre voisin ne partira pas non plus. “Nous nous contentons des plages proches et seulement de temps à autre. Il m’arrive même de travailler au noir quelques heures seulement par semaine et encore... Quant au chômage, je n’ai rien touché pour l’instant”. Je remarque aussi que les plages d’Attique ne désemplissent pas en ce moment, sauf que certains habitués de juin et de juillet n’y viennent plus, visiblement ils sont en vacances ailleurs que chez eux. Ils appartiennent alors au 20% des... ayant droit. (...)

Chez ERT, c’est aussi le presque vide, hormis quelques concerts et débats. La non-situation s’éternise, tandis que l’ersatz gouvernemental nommé NERIT est sur les rails. Pour environ deux mille postes de techniciens, journalistes et administratifs et pour de contrats de deux mois “dans un premier temps” d’après l’annonce parue dans la presse, il y aurait déjà plus de huit mille candidats dont des anciens d’ERT. Pavlos exemple, qui ne cache pas la nature de sa motivation : “Je fais toujours partie du comité de lutte chez ERT. Sauf que demain, je dois nourrir ma famille, nos professions sont déjà sinistrées, je n’ai guère de choix...”. (...)

L’Europe, approfondie et surtout de la solidarité c’était peut-être pour avant-hier et encore. Désormais, le séisme devient permanent et nos institutions ex-démocratiques s’enfoncent trop bas sous la ligne de flottaison. Et dans les profondeurs... on y rencontre bien d’autres créatures politiques étonnantes et monstrueuses, c’est ainsi. (...)

Les journalistes et les techniciens de la radiotélévision “902 à Gauche” et comme tant d’autres, n’ont pas reçu de salaire entier depuis plusieurs mois. Mes propres sources indiquent que désormais, le sentiment de l’écœurement n’épargne guère leurs familles, pourtant proches et souvent membres du parti. “Ils doivent plus de 25.000 euros à mon Andréas” s’indigne une mère depuis les quartiers sud de la capitale. L’épouse d’Andréas, après plus d’un an de chômage vient d’émigrer dans un pays du Golfe.

Pour la “petite histoire”, Andréas sera licencié, comme l’ensemble du personnel aux medias du KKE car de toute manière le repreneur les achètera “propres”, sans le personnel. De toute évidence et d’après les derniers reportages, ces employés seront “transférés” au sein d’une autre entreprise du parti pour ainsi être aussitôt licenciés. C’est une forme de trucage ou de montage, quoi qu’on affirme du côté du KKE. Le rideau tombe... et il est rouge. (...)

“De la Grèce, ne demeurent que certains fragments, il ne nous reste que de prier nos divinités, mais alors lesquelles ?”, avait déjà écrit notre poète Elytis vers 1990, quelques années seulement avant sa mort. De gauche ou de droite et à moins d’être idiot... ou ministre au gouvernement, on comprend que l’effondrement ainsi organisé que nous subissons en ce moment risque d’être total, voire totalitaire. (...)

On sait aussi ou du moins on le devine, que malgré la guerre économique orientée contre l’essentiel de notre société et du monde du travail devenu en trois ans seulement un “monde parallèle”, nous ne sombrons pas encore dans le chaos. Ceci, grâce à une certaine... main invisible sociale et non pas du marché. C’est ainsi que nous accomplissons encore notre possible, dans nos relations, dans un semblant de normalité et de solidarité tous les jours. À l’image du directeur d’un supposé grand journal. Il a prêté récemment, trois cent euros de sa poche à un employé. Ce dernier, n’avait pas reçu de salaire depuis trois mois déjà. Cette solidarité et d’ailleurs plus amplement cette normalité précaire, n’est certainement pas l’œuvre des partis politiques ni des syndicats car ils n’ont rien pu faire de très efficace dans ce sens. Tel est le sentiment général ici et qui prédomine, justement ou pas.

Tout reste à faire. Surtout dans à travers tel semblant de normalité et de solidarité... époque mi-figue mi-raisin.