
Prises de décisions collectives, tâches ménagères, communication… Immersion dans une colonie de vacances qui veut responsabiliser les enfants, à la zad de Notre-Dame-des-Landes.
« Attention, baissez la tête ! » Assis à l’arrière de la calèche, les quatre garçons se penchent en riant et protègent leur crâne sous leurs mains. Le véhicule, tracté par une jument baptisée Régate, s’avance sur les chemins cahoteux d’un sois-bois, autour de la zad de Notre-Dame-des-Landes.
En plein cœur de cette chaude journée d’été, la promenade équestre constitue l’une des activités du jour choisies par les enfants, durant leur colonie de vacances.
Pendant que ce petit groupe essaie d’éviter les branches fouetteuses, un deuxième découvre les vaches et l’atelier de forgerie de la ferme de Bellevue. Une dernière bande d’enfants a préféré rester au camp, installé un peu plus loin sur la zad.
Au programme : du bricolage, pour reproduire des objets du jeu de société Galérapagos. « C’est super chouette, on est loin de la ville, il n’y a pas le bruit des voitures. J’adore cet endroit », se réjouit Louis, 12 ans. (...)
l’association rennaise La Bidouillerie veut proposer à ses 24 petits vacanciers un cadre bien particulier, basé sur « les pédagogies de la décision ». « Les enfants sont acteurs de l’organisation du séjour », explique Raph, membre de la coprésidence de l’association. (...)
Ainsi, dans cette colonie de vacances, chaque matinée commence avec un « forum ». Rassemblés à l’intérieur d’un grand dôme vert, mi-tente mi-yourte, les enfants sont invités à choisir, guidés par leurs animateurs et animatrices, le programme de leur journée.
Une à une, les suggestions d’activités — écrites par les enfants la veille sur des petits papiers — sont listées : « Faire une grande bataille navale », « un concours de cuisine », « écrire une chanson », « aller à la forge »… Mais pas toujours facile de faire dialoguer ensemble 24 enfants.
Bâton de parole
Dans le dôme, les voix aiguës s’élèvent, s’entremêlent, et il devient difficile de suivre. « On ne s’écoute pas toujours, reconnaît Rose, 11 ans. Cette semaine, on a essayé d’utiliser un bâton de parole à tour de rôle, ça n’a pas trop fonctionné. On a tenté des discussions en petits groupes, avec un porte-parole qui discute ensuite avec les autres, c’était mieux. »
Les enfants n’ont pas l’habitude. Ils tâtonnent. Mais ils réussissent à prendre leurs marques, au fil des jours. « Voir des enfants de 8 à 12 ans qui s’approprient des outils d’autogestion et de prise de décision, c’est génial, se réjouit Lucie, animatrice. Plus vite tu te les appropries, plus vite tu es attentif aux autres. En fait, c’est apprendre à vivre ensemble. » (...)
« On peut décider de ne rien faire aussi », sourit malicieusement Félix, 10 ans, allongé avec ses copains sur le trampoline. S’ils ne souhaitent pas participer aux grands jeux, les enfants ont le droit de se balader sur le camp, lire, jouer au ballon, se reposer… (...)
Pas question toutefois de buller pendant une semaine sans mettre la main à la pâte. Tous les jours, après le déjeuner — dont les enfants ont aussi choisi la composition au moment du « forum » — vient le moment des tâches collectives.
Un petit groupe s’occupe de la vaisselle, un autre de nettoyer le camp, un autre de vider les toilettes sèches… (...)
« Quand tu as lavé plusieurs fois les douches, les toilettes, tu comprends le travail que ça représente. Tu deviens responsable de l’espace », estime Romane. (...)
« L’autre soir, on a lu une bande dessinée qui expliquait ce qu’était le racisme, raconte Ulysse, 12 ans. Il y a des chiffres qui m’ont fait peur. En discuter, ça m’a soulagé. » (...)