Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Reporterre
Des fermes urbaines pour remplacer l’agriculture francilienne ?
Article mis en ligne le 28 avril 2018
dernière modification le 26 avril 2018

À Paris, soutenues par la mairie, les fermes urbaines sont en plein essor et drainent les investissements. Mais certains craignent que cet engouement ne serve d’alibi à l’artificialisation des terres fertiles franciliennes, comme à EuropaCity.

33 sites, et bientôt 43 de plus. 5,5 hectares en 2018 ; à l’horizon 2020, 30 hectares de prévus. La Ville de Paris a dépensé 400.000 euros pour accompagner les porteurs de projet de fermes urbaines, et 2,5 millions pour préparer l’espace parisien (toits, friches, hangars, caves...) à leur accueil. Mais pendant que Parisculteurs, le projet de la Ville de Paris qui récompense les fermes urbaines innovantes de la capitale, se gargarise de chiffres, 1.400 hectares de terres agricoles disparaissent chaque année en Île-de-France. Portées par leur succès médiatique et l’argent que les pouvoirs publics y investissent, les fermes urbaines nuiraient-elles aux terres agricoles ?

À première vue, les deux univers n’ont rien à voir. Au mieux, ils cultivent l’indifférence(...)
« Plus l’urbain avance, plus les filières reculent, et plus les coûts de logistique augmentent » (...)
Un projet d’aménagement, récemment remis en cause par la justice, illustre on ne peut mieux l’usage des fermes urbaines comme justification au bétonnage des sols : EuropaCity. Ce gigantesque complexe envisage d’implanter sur les terres du triangle de Gonesse, parmi les plus riches de France, une ferme urbaine de sept hectares, alors qu’il détruirait dans le même temps 80 hectares. La Ferme, puisque tel est son nom, se vante de devenir un « véritable hub de l’agriculture périurbaine, intégrée à son territoire », d’« innover et de démontrer ses savoir-faire » et de porter une « vision d’avenir ». Une idée qui fait rire jaune Anne Gellé, bénévole à Terre de liens : « La Ferme devrait se situer dans le secteur le plus bruyant de l’aéroport de Roissy. L’accueil du public y serait sympa… »

Plus sérieusement, la bénévole précise la raison d’être du projet : « La Ferme serait un lieu sous cloche. Elle ne servirait que d’alibi au projet plus vaste d’EuropaCity. En donnant une mauvaise image des terres de la région, présentées comme sales, polluées et en mauvais état, elle légitimerait leur bétonnage. »

« L’agriculture urbaine n’a aucun sens si elle n’est pas en lien avec l’agriculture conventionnelle » (...)

Interrogé sur le rôle de caution au bétonnage que pourraient jouer les fermes urbaines, Grégoire Bleu se récrie : « Il est hors de question qu’on serve d’alibi ! » Le président de l’Afaup détaille ensuite la politique de l’association : « Lorsqu’un nouveau membre nous rejoint, il signe un livre blanc qui spécifie clairement dès les premières pages que l’agriculture urbaine ne justifie pas l’emprise sur les terres agricoles. À nous ensuite de veiller à ce que nos adhérents respectent notre engagement. » Et de conclure : « L’agriculture urbaine n’a aucun sens si elle n’est pas en lien avec l’agriculture conventionnelle. »

Dimension pédagogique des fermes urbaines

Car en dépit d’une éventuelle mise en concurrence sur la question du foncier, les acteurs du monde agricole déclarent chercher une complémentarité entre agriculture urbaine et agriculture en pleine terre. Les échanges entre les deux s’intensifient. (...)
Reste à convaincre les décideurs politiques. En l’absence d’une stratégie agricole transversale, qui lierait le caractère expérimental des fermes urbaines et la vocation productive de l’agriculture en pleine terre, la loi du bétonnage domine, car les métropoles se désintéressent de leurs anciennes ceintures maraîchères.